Présidentielle au Mali : ils veulent faire gagner IBK

Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), président sortant et candidat à sa propre succession le 29 juillet prochain, ne se lancera pas seul dans la bataille. Tour d’horizon de son équipe de campagne.

Karim Keïta, président de la commission Défense, sécurité et protection civile de l’Assemblée nationale malienne © Emmanuel Daou Bakary pour JA

Karim Keïta, président de la commission Défense, sécurité et protection civile de l’Assemblée nationale malienne © Emmanuel Daou Bakary pour JA

BENJAMIN-ROGER-2024

Publié le 1 juillet 2018 Lecture : 6 minutes.

Le palais de Koulouba, residence officielle et bureau du président de la République du Mali, Bamako, novembre 2017. © Vincent Fournier /JA/REA.
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Mali : sur un air de campagne présidentielle

Vingt-quatre candidats sont en lice pour l’élection présidentielle du 29 juillet au Mali. Le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, cédera-t-il sa place ? Soumaïla Cissé, son principal rival, arrivera-t-il à s’imposer ? Quelles alliances les candidats ont-ils nouées ? Retrouvez notre dossier complet.

Sommaire

Il a fait le choix de se déclarer seul, face caméra, plutôt que dans un grand meeting au palais des Sports de Bamako. Le 28 mai, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) officialisait sa candidature à un second mandat dans une déclaration solennelle à la télévision nationale, enregistrée depuis sa résidence privée de Sébénikoro. Dans la compétition serrée qui se profile jusqu’au premier tour de la présidentielle, le 29 juillet, il ne sera pourtant pas seul pour convaincre les Maliens de lui renouveler leur confiance. IBK pourra compter sur le soutien de fidèles qui, sur le devant de la scène ou en coulisses, l’aideront à essayer de prolonger son bail au palais de Koulouba. Tour d’horizon thématique en quatre partie : les ministres, la famille, les politiques et… les gardiens du Nord.

L’appui de ses ministres

Le Premier ministre malien, Soumeylou Boubèye Maïga © Emmanuel Daou Bakary pour JA

Le Premier ministre malien, Soumeylou Boubèye Maïga © Emmanuel Daou Bakary pour JA

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Si IBK est réélu, beaucoup considèrent qu’il le devra en grande partie à son Premier ministre. Depuis sa nomination, le 31 décembre dernier, Soumeylou Boubèye Maïga, 64 ans, se démène pour son patron. Ancien ministre de la Défense, puis secrétaire général de la présidence, il est l’homme de confiance, celui par lequel passent tous les dossiers. « C’est lui le grand stratège. Il maîtrise tout », souffle un proche du président.

Occupé à ramener un semblant de stabilité dans le pays d’ici à la fin du mandat, il a reçu pour mission principale d’organiser le scrutin et de gérer l’État pendant qu’IBK fera campagne. Si le tandem parvient à se maintenir au pouvoir, il y a fort à parier que l’incontournable « Boubèye » sera prolongé à la primature.

Tiéman Hubert Coulibaly, ancien ministre malien des Affaires étrangères, lors de la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Mali, le 11 avril 2018. © Mary Altaffer/AP/SIPA

Tiéman Hubert Coulibaly, ancien ministre malien des Affaires étrangères, lors de la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Mali, le 11 avril 2018. © Mary Altaffer/AP/SIPA

Tiéman Hubert Coulibaly est l’une des figures de l’exécutif version IBK. Après avoir dirigé trois ministères – dont celui de la Défense – depuis 2013, il est désormais chargé des Affaires étrangères. Un poste prestigieux, d’où il tente d’obtenir un maximum de soutiens à IBK à l’étranger. Allié de la première heure du président, il apporte aussi l’appui de son parti, l’Union pour la démocratie et le développement (UDD), l’une des formations qui composent la coalition Ensemble pour le Mali.

Boubou Cissé est un autre fidèle. Nommé à l’Industrie et aux Mines en 2013, il a été promu ministre de l’Économie et des Finances en 2016. Malgré son jeune âge, ce quadragénaire passé par la Banque mondiale est considéré comme l’un des piliers du gouvernement. Président de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-Pasj), Tiémoko Sangaré incarne l’alliance stratégique entre IBK et le parti des abeilles, l’un des mieux implantés à travers le pays. Aujourd’hui ministre des Mines, il a manœuvré pour écarter toute candidature interne et assurer le soutien de son parti au président sortant. Après plusieurs semaines de crise, l’Adema-Pasj a ainsi officiellement choisi de ne pas présenter de candidat et de rallier la coalition présidentielle.

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La famille d’IBK

Élu député de la commune II de Bamako sous les couleurs du Rassemblement pour le Mali (RPM) en 2013, Karim Keïta, le fils du chef de l’État, préside la commission Défense, sécurité et protection civile de l’Assemblée nationale. Grâce à ce poste, il a gagné une influence certaine sur les questions de défense et de sécurité – au grand dam de l’opposition, qui voit en lui un symbole du népotisme du régime et qui l’accuse d’être impliqué dans plusieurs affaires.

Proche collaborateur d’IBK, son neveu Mustapha Ben Barka joue un rôle majeur dans la coordination de l’action présidentielle

Native de Gao, dans le Nord, Aminata Maïga Keïta est l’épouse d’IBK. La première dame dirige la fondation Agir, qui est à l’œuvre dans les domaines de l’éducation et de la santé. Très active sur les réseaux sociaux, elle affiche publiquement son soutien à son mari dès qu’elle en a l’occasion.

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Moustapha Ben Barka est un neveu d’IBK – il est le fils de la sœur de la première dame. Ancien ministre de l’Industrie et de la Promotion des investissements, il a ensuite été nommé secrétaire général adjoint de la présidence. En décembre dernier, il est promu secrétaire général en remplacement de Soumeylou Boubèye Maïga, passé à la primature. Proche collaborateur d’IBK, il joue un rôle majeur dans la coordination de l’action présidentielle.

Issaka Sidibé est considéré comme l’un des barons du RPM. Il est aussi le beau-père de Karim Keïta. Le président de l’Assemblée nationale est un vieux compagnon de route d’IBK, qu’il a suivi au début des années 2000 lorsque celui-ci a quitté l’Adema-Pasj pour fonder le RPM. Député de Koulikoro, il a toutefois perdu de son influence ces derniers mois.

Les politiques

« IBK est le président-fondateur du RPM. Il est normal que le parti dépende de lui », explique l’un de ses fidèles. À l’image du Parti démocratique sénégalais, d’Abdoulaye Wade, le RPM existe à travers son créateur. Ses cadres sont donc au service du chef de l’État. Ancien ministre du Développement rural, Bokary Treta, président du parti et vice-président de l’Internationale socialiste, sera le chef d’orchestre de la campagne. Il dirige Ensemble pour le Mali, qui regroupe une soixantaine de partis et d’associations, mais dont le RPM est la principale composante. « Nous allons mener une grande campagne populaire. Le président va se rendre dans les principales villes du Mali dans les semaines à venir », affirme-t-il, ajoutant disposer d’un « budget important » pour faire campagne.

Deux jeunes loups du parti devraient aussi se battre pour la réélection d’IBK

Plusieurs autres cadres du RPM seront en première ligne, dont le député Mamadou Diarrassouba, premier questeur à l’Assemblée nationale. Il coordonne la coalition présidentielle dans la région de Koulikoro, la deuxième plus peuplée du Mali. Réputé fin manœuvrier, il est un des hommes forts du parti. Deux jeunes loups du parti devraient aussi se battre pour la réélection d’IBK. Moussa Tembiné, premier vice-président de l’Assemblée nationale, dirige la section jeunes du parti. Considéré comme étant assez tranchant, il n’a pas froid aux yeux et jouera un rôle dans la mobilisation populaire en faveur du pouvoir. Son prédécesseur à la tête de la jeunesse du RPM, Mahamane Baby, ancien ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, est lui secrétaire général d’Ensemble pour le Mali.

Les gardiens du Nord

Ibrahim Boubacar Keïta à Kidal, en juillet 2013. © DR

Ibrahim Boubacar Keïta à Kidal, en juillet 2013. © DR

Si la grande majorité des 8,5 millions d’électeurs vivent dans le sud du pays, le Nord constitue un enjeu majeur de la présidentielle à venir. IBK y bénéficie de l’appui de plusieurs personnalités respectées originaires de différentes communautés. Touareg natif de Tessalit, dans la région de Kidal, Mohamed Ag Erlaf est le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Il est, à ce titre, en première ligne dans l’organisation de l’élection. Touarègue de la tribu des Idnane, Nina Wallet Intalou est elle aussi originaire de la région de Kidal. En juillet 2016, la nomination de cette ancienne figure du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) au poste de ministre de l’Artisanat et du Tourisme avait fait grincer des dents les nationalistes à Bamako. Elle soutient ouvertement IBK depuis le lancement, à la mi-juin, de son mouvement en faveur d’une réélection du président.

À Kidal, IBK jouit aussi du soutien de deux membres influents de la tribu des Ifoghas : Mohamed Ag Intalla et Ahmada Ag Bibi. Le premier est l’aménokal des Ifoghas. Le second est un ex-lieutenant d’Ansar Eddine, le groupe jihadiste d’Iyad Ag Ghali. Tous deux sont aujourd’hui des députés RPM et seront mis à contribution pour que le déplacement annoncé d’IBK dans le fief de la rébellion touarègue se déroule sans encombre.

Enfin, El Hadj Ag Gamou est un allié de poids. Général de l’armée malienne, il est aussi le chef du Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia). Cette milice progouvernementale, qui a longtemps combattu les groupes armés indépendantistes du Nord, est active dans la région de Ménaka, où elle participe à des opérations antiterroristes avec la force française Barkhane.

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