Manutention : où sont passés les opérateurs asiatiques ?

Fleurons mondiaux du secteur de la manutention, les groupes chinois et singapouriens rechignent à exploiter les plateformes portuaires qu’ils construisent.

Les compagnies chinoises brillent par leur absence sur les ports africains, comme ici à Djibouti. © Vincent Fournier/Jeune Afrique

Les compagnies chinoises brillent par leur absence sur les ports africains, comme ici à Djibouti. © Vincent Fournier/Jeune Afrique

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Publié le 18 juillet 2018 Lecture : 3 minutes.

Port de Cotonou, novembre 2017.© Jacques Torregano pour JA © Jacques Torregano pour JA
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Ports africains : l’Europe place ses pions

En nouant des partenariats avec les terminaux du continent, les Européens veulent contenir l’avancée de leurs rivaux asiatiques.

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« J’attends encore celui qui pourra m’expliquer la stratégie des grands groupes de manutention asiatiques en Afrique. » Yann Alix, le délégué général de la fondation Sefacil, n’est pas le seul expert maritime à espérer un tel messie, tant le positionnement des asiatiques sur les ports du continent reste difficilement lisible. À commencer par celui des entreprises chinoises qui, depuis une décennie, coulent des millions de tonnes de béton pour équiper l’Afrique de terminaux portuaires ultramodernes qu’elles se refusent à opérer en direct.

Le meilleur exemple reste celui de China Merchants Group (CMG) et de sa filiale, China Merchants Port Holdings. Le conglomérat public intervient sur les terminaux les plus importants de son pays, de Shanghai à Shenzhen en passant par Ningbo et Hong Kong, où le cinquième manutentionnaire mondial a installé son siège en 1991. Il participe aussi activement à la politique des nouvelles routes de la soie développée ces dernières années par le président Xi Jinping.

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CMG a ainsi investi plusieurs dizaines de milliards de dollars pour la réalisation de ports clés en main au Sri Lanka, en Turquie et surtout à Djibouti, dont Pékin semble vouloir faire sa porte d’entrée privilégiée en Afrique. Mais contrairement à son fonctionnement au sein de ses installations chinoises, il se contente de prendre des participations sur les terminaux et laisse à ses partenaires le soin des opérations. À Djibouti, il sort même de son rôle puisqu’il détient, depuis 2013, 23,5 % de l’autorité portuaire.

Les leaders historiques défendent leur pré carré

CMG reste fidèle à la stratégie appliquée depuis son arrivée sur le continent en 2010, choisissant de s’effacer derrière un opérateur de renom, comme avec Bolloré Logistics pour le terminal de Tincan, dont le conglomérat détient 47,5 %, et le Lomé Container Terminal (LCT) qu’il possède pour moitié.

Les flux de marchandises en provenance ou à destination de la Chine, qui dopent ces dernières années les volumes commerciaux africains et donc les trafics portuaires à travers le continent, rendraient pourtant légitime toute volonté de CMG de prendre en charge les opérations de manutention. « Ils ne nous ont jamais rien demandé de tel , assure Wahib Daher Aden, directeur du port polyvalent de Doraleh, où seulement trois chinois sont présents sur les quais.»

Tout aussi surprenant est le manque de réussite des deux principales firmes de manutention au monde : Port of Singapore Authority (PSA) et Hutchison Port Holdings (HPH), basée à Hong Kong. Après avoir été éconduits à Abidjan et à Djibouti, les Singapouriens n’ont toujours pas trouvé de point de chute en Afrique, alors qu’ils manutentionnent près de 8 % du trafic conteneurisé mondial.

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De son côté, HPH a bien posé le pied à Dar es-Salaam et à Alexandrie, mais pour gérer des installations de faible capacité. « Ces géants n’ont pas vocation à construire des ports mais à opérer efficacement des terminaux modernes de grande taille », explique un spécialiste du secteur maritime. Et en la matière, le français Bolloré, le danois APM Terminals et l’émirati DP World n’ont pas attendu leurs concurrents asiatiques pour se partager les côtes africaines.

Une carte à jouer pour China Merchants Group

Alors que d’autres grands « stevedores », comme le chinois Cosco et le taïwanais Evergreen, manquent aussi à l’appel, le philippin ICTSI semble aujourd’hui le plus à même de tirer son épingle du jeu. Bien qu’évincé d’Abidjan en 2013 et plus récemment de Kribi, le 14e opérateur mondial manutentionne dans le port malgache de Toamasina et dans celui de Matadi en RD Congo. Il a par contre jeté l’éponge à Lekki, au Nigeria, où il avait été retenu en 2012 par le fonds singapourien Tolaram.

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Alors que peu de projets significatifs sont attendus, maintenant que l’Afrique semble disposer des équipements portuaires dont elle a besoin, c’est CMG qui paraît avoir la plus belle carte à jouer en développant, pour 10 milliards de dollars (8,5 milliards d’euros), un port flambant neuf à Bagamoyo, en Tanzanie. Celui-ci est dimensionné pour traiter 20 millions de conteneurs par an à l’horizon 2040. Que les Chinois devraient, une nouvelle fois, éviter de manutentionner eux-mêmes.

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