Ku Klux Klan : l’infiltration extrême d’un policier américain

Le policier américain Ron Stallworth raconte comment il espionna le Ku Klux Klan, mais aussi certains groupes antiracistes.

 © Eric Charbonneau/REX//SIPA

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Publié le 21 septembre 2018 Lecture : 2 minutes.

Pour réaliser son dernier film, Blackkklansman, le réalisateur africain-américain Spike Lee s’est inspiré d’une histoire vraie, celle de Ron Stallworth, « le Noir qui infiltra le Ku Klux Klan » à la fin des années 1970. Une histoire racontée dans un livre par son protagoniste, en 2014, et opportunément traduite en français cette année.

S’il manque sans doute à ce récit la cocasserie qui fait le sel du film, il mérite d’être lu avec attention. Notamment parce qu’il se déroule à une époque charnière dans l’histoire de la lutte pour les droits civiques : Martin Luther King a été assassiné, le Ku Klux Klan n’a plus l’influence qu’il a pu avoir par le passé, les Africains-Américains commencent à voir leur situation s’améliorer – même si les progrès demeurent lents.

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Infiltration

Premier Noir à occuper un poste d’inspecteur à la brigade de renseignements de la police de Colorado Springs, Stallworth tombe, en octobre 1978, sur une annonce du Klan publiée dans le journal. Inspiré, il y répond, et le voilà embarqué dans l’enquête de sa vie : avec l’aide d’une doublure – difficile pour un Noir de se présenter à une réunion du KKK ! – il infiltre le groupe suprémaciste qui entend se développer à Colorado Springs et obtient de nombreuses informations.

En 1979, quand l’enquête touche à son terme, il en tire le bilan. « J’ai fait un point rapide sur l’ensemble de l’enquête : les précieux renseignements collectés sur deux des groupuscules racistes les plus virulents (le Klan et le Posse Comitatus) ; la découverte de leur infiltration dans nos installations militaires (l’US Army, l’Air force et le Norad) ; le Black Panther Party et les Black Muslims que nous avions réussi à garder à distance de Colorado Springs afin qu’ils ne viennent pas mêler leur venin verbal à celui du Klan et nuire à la dynamique sociale ; les croix qu’à deux reprises au moins le Klan avait échoué à faire flamber ; et l’impact national des informations que nous avions réussi à obtenir, tant pour les forces de l’ordre que pour les organismes privés tels que l’Anti-Defamation League. »

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Pour le lecteur, le récit de Stallworth est une riche source d’informations historiques – d’autant plus appréciable qu’elle se fonde sur des documents que l’auteur aurait dû détruire s’il avait suivi les instructions de ses chefs. Les trajectoires de personnages comme le grand sorcier du Klan, David Duke, ou le pasteur Ralph Abernathy, proche de MLK, y sont brossées avec vivacité par un policier qui n’oublie jamais de faire des liens avec la période contemporaine – où les idées suprémacistes ont passé la porte de la Maison-Blanche.

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Groupes idéologiques

Mais le plus intéressant dans le récit de Stallworth reste sans aucun doute les questions qu’il soulève sur la société américaine, où toutes les formes de pensées sont acceptées, mais où tous les groupes idéologiques sont de facto considérés comme suspects par la police et étroitement surveillés.

Ce que Stallworth n’avoue qu’à demi-mot, c’est que son enquête servit aussi à obtenir des renseignements sur les ennemis du KKK, les militants de différents groupes antiracistes. Avant d’infiltrer les rangs des suprémacistes, Stallworth n’avait pas hésité à s’inviter incognito dans un meeting de Stokely Carmichael, des Black Panthers !

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