Gastronomie : Atef Barbouche, l’Arcimboldo de la salade de fruits

Dans sa petite cuisine au sous-sol de La Ferme de Longchamp (Paris 16e), le jeune Atef Barbouche compose de superbes créations comestibles. Sans sucres ajoutés.

Atef Barbouche de la Ferme de Longchamp, 11 septembre 2018 © Bruno Levy pour JA

Atef Barbouche de la Ferme de Longchamp, 11 septembre 2018 © Bruno Levy pour JA

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 12 octobre 2018 Lecture : 3 minutes.

Pour les fruits comme pour lui-même, Atef Barbouche a le sens de la mise en scène. Dans le froid polaire de sa cuisine, au sous-sol de La Ferme de Longchamp, armé d’un grand sourire et d’un couteau affûté, il lance d’une voix puissante « OK Google. Musique classique ! ». Et les violons retentissent dans l’antre minuscule où l’Arcimboldo de la salade de fruits officie, en chef d’orchestre des ananas, figues, kiwis et autres gourmandises venues du monde entier.

Originaire de Djerba, comme le veut la caricature selon laquelle tous les « Arabes du coin » ouverts jusqu’à point d’heure seraient des Tunisiens de cette île

L’histoire d’Atef Barbouche, 33 ans, n’a rien d’original. Du moins au début. Il est l’un des fils du Tunisien Fatih Barbouche, épicier et lui-même fils d’épicier. Originaire de Djerba, comme le veut la caricature selon laquelle tous les « Arabes du coin » ouverts jusqu’à point d’heure seraient des Tunisiens de cette île. « Nous étions souvent dans la boutique, quand ma mère ne pouvait pas nous garder », se souvient le jeune homme qui, lui, s’est orienté vers la pâtisserie, qu’il a étudiée pendant deux ans au Centre européen des professions culinaires (Ceproc).

L’Arcimboldo de l’agrume imagine aujourd’hui étendre son savoir-faire dans toute la France © Bruno Levy pour JA

L’Arcimboldo de l’agrume imagine aujourd’hui étendre son savoir-faire dans toute la France © Bruno Levy pour JA

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« Je voulais acheter une boulangerie-pâtisserie, mais je me suis vite rendu compte du poids des charges salariales, dit-il. Puis mon père m’a annoncé qu’il voulait céder son affaire et m’a demandé si je ne voulais pas la reprendre… » Pour les Barbouche, être primeur, c’est avant tout une histoire de contact humain et de vie de village au cœur de Paris, qui va au-delà du simple fait de vendre des légumes.

Effet « Wow »

En 2010, le jeune Atef reprend ainsi La Ferme de Longchamp, dans le très chic 16e arrondissement. « Dès le début, j’ai eu envie de faire des jus de fruits, poursuit Atef. J’étais le seul à le proposer, et ç’a cartonné. » Pourtant, il n’est pas tout à fait satisfait : « Je me suis rendu compte au bout d’un moment que le côté artistique de la pâtisserie me manquait. J’avais envie de l’effet “Wow !” de la création »

Jouant des couleurs et des formes, des creux et des pleins, le fringant et bavard jeune homme agence les fruits pour former de véritables tableaux multicolores et comestibles

L’effet « Wow » ? Un coup d’œil aux compositions d’Atef Barbouche suffit pour comprendre de quoi il s’agit. Jouant des couleurs et des formes, des creux et des pleins, le fringant et bavard jeune homme agence les fruits pour former de véritables tableaux multicolores et comestibles, choisissant avec soin les meilleurs produits. Il est aussi l’inventeur du gâteau de fruits, dont les seuls ingrédients sont naturels, sucrés et juteux.

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L’entendre parler de la texture des pitayas, du goût des dattes israéliennes ou du liant permis par le jus de kiwi, c’est déjà un alléchant poème. Le coût ? Entre 50 et 1 000 euros la composition, 240 pour la « Hawaii », celle qui a le plus de succès auprès des palaces du coin ou de certaines grandes entreprises.

De trois salariés en 2010, La Ferme de Longchamp est passée à 7, en 2018, mais Atef Barbouche prépare ses compositions seul devant son plan de travail et les personnalise, « très attentif à la satisfaction du client ».

Son budget ? Il n’en parlera pas : « Je préfère rester discret car nous pensons développer des franchises »

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Son budget ? Il n’en parlera pas : « Je préfère rester discret car nous pensons développer des franchises », explique-t-il. Très actif sur le plan médiatique, Barbouche compte quelques stars parmi ses clients et affiche avec fierté le selfie pris avec le président français, Emmanuel Macron, à l’Élysée, où il venait de livrer une de ses œuvres.

Ces derniers temps, croulant sous les commandes, il a pris un apprenti pour l’aider en cuisine. Une première étape pour celui qui entend bien former des artistes du fruit dans toute la France et transmettre le savoir-faire qu’il a développé.

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