Telecel rebat les cartes du mobile en Afrique de l’Ouest

Après avoir réalisé cette année une percée au Mali, la filiale du groupe burkinabè Planor Afrique, également présente en Côte d’Ivoire, vise la place de leader dans une région dominée par des acteurs étrangers.

Pour l’opérateur, l’objectif au Mali est de conquérir 3 % de part de marché dès sa première année © Emmanuel Daou Bakary pour JA

Pour l’opérateur, l’objectif au Mali est de conquérir 3 % de part de marché dès sa première année © Emmanuel Daou Bakary pour JA

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Publié le 14 novembre 2018 Lecture : 4 minutes.

Un vendeur de téléphone à Cotonou. © Gwenn Dubourthoumieu pour Jeune Afrique
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Télécoms et Internet : l’heure du data

L’essor de la connectivité rebat les cartes du secteur. Au sommaire de ce dossier, la rencontre avec Alioune Ndiaye, directeur général Afrique et Moyen-Orient d’Orange, mais aussi la stratégie du groupe Atos la percée au Mali de Tellecel et les bons résultats de Tunisie Telecom.

Sommaire

Lancée en février sous la marque Telecel Mali, la société Alpha Télécom­munication (Atel) affirme avoir bouclé la première phase de déploiement de son réseau. Ce qui permet à l’opérateur, filiale du groupe burkinabè Planor Afrique, fondé par l’entrepreneur burkinabè Apollinaire Compaoré, 65 ans, aujourd’hui actif dans les assurances, la banque, l’hôtellerie et la distribution, de couvrir les villes de Bamako, Kati, Koulikoro, Ségou, Sikasso, Koutiala et Kayes.

« Nous déployons un réseau “full IP” en 3G+ sur tous nos sites, que ce soit à Bamako ou à l’intérieur du pays, qui permet à nos abonnés où qu’ils soient d’accéder à l’internet haut débit mobile. De plus, notre réseau métropolitain en boucle et la mise en place de liaisons internationales redondantes par fibre optique, via le Sénégal et la Côte d’Ivoire, et par satellite offrent également la meilleure disponibilité dans les zones couvertes », confie Souleymane Diallo, patron de Telecel Mali.

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Les appels nationaux à 1 F CFA par seconde

Plus de quatre ans après avoir obtenu la concession, le groupe d’Apollinaire Compaoré affiche ainsi ses ambitions régionales. Outre Atel Mali, le groupe Planor contrôle également Telecel Faso, numéro trois au Burkina avec une part de 19 % du parc d’abonnés – environ 12, 5 millions – et qui détient 26 % de l’opérateur MTN Côte d’Ivoire. « Au moyen de ces investissements, le groupe Planor entend devenir leader de la téléphonie mobile en Afrique de l’Ouest en offrant à ses clients le meilleur service dans leurs vies personnelle et professionnelle », affirme l’entrepreneur burkinabè.

Au Mali, Planor a investi plus de 100 milliards de F CFA (152,5 millions d’euros) pour le déploiement des opérations d’Atel. Parmi ses financiers figure la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), qui a finalement porté son enveloppe à 11 milliards de F CFA le 13 décembre 2017 (contre les 10 milliards prévus en 2015) pour l’acquisition des équipements auprès du chinois Huawei. Au total, un pool bancaire constitué de sept établissements a appuyé le projet, dont la Banque sahélo-­saharienne pour l’investissement et le commerce (BSCI) Mali (58 milliards) ou encore la Banque d’investissement et de développement de la Cedeao (7,5 milliards).

>>> À LIRE – Planor Afrique : Apollinaire Compaoré, l’opiniâtre

Le nouvel opérateur entend surfer sur l’évolution récente du marché malien du mobile. Depuis 2012, le taux de pénétration du mobile a littéralement explosé, passant de 73 % à 142 % en 2016, avec environ 23 millions d’abonnés pour une population estimée à environ 16 millions d’habitants. Grâce à une politique des prix cassés, à 1 F CFA par seconde pour les appels nationaux au Mali et à partir de 1,50 F CFA à l’international, conjuguée au succès des forfaits internet à partir de 100 F CFA pour un mois, l’opérateur indique avoir réalisé une percée sur le marché malien avec déjà près de 700 000 clients connectés, et plus de 20 000 points de vente actifs. Avec ses solutions de mobile banking et de voix, l’opérateur burkinabè estime avoir une carte à jouer, notamment auprès des jeunes, grâce à la qualité de son réseau. « Nous allons développer nos deux marchés. Pour cela, nos investissements se poursuivent », a déclaré Apollinaire Compaoré.

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Masse critique

« L’arrivée d’Atel bouscule le duopole Orange-Malitel. De mon point de vue, le démarrage des activités d’Atel est une réussite due en partie à son offensive auprès des jeunes. Le marché africain se rationalise, et seuls les grands groupes survivront. L’appartenance au groupe Planor va lui permettre d’avoir une masse critique, et in fine d’avoir la force de négociation nécessaire face aux fournisseurs de services et aux partenaires techniques », décrypte, sous le couvert de l’anonymat, un fin connaisseur du secteur en Afrique de l’Ouest.

« Nous comptons profiter de la très forte attente des populations en offrant des services à coûts abordables », plaide le PDG sénégalais d’Atel. Leader, Orange compte 11,5 millions d’abonnés, alors que Malitel, la filiale locale de Maroc Télécom, a vu le nombre de ses clients bondir de 6 à 8,1 millions. D’après les données du secteur, Orange Mali (126,76 milliards de F CFA de chiffre d’affaires) conserve une position dominante sur le marché avec près de 65 %, suivi de loin par Sotelma (35 %).

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Le nouvel arrivant se console avec une part de marché de plus de 1 %. Avec un parc mobile et fixe estimé à environ 24 millions d’utilisateurs, Orange a même vu son nombre d’abonnés dégringoler de 14,9 millions à 12,6 millions. L’arrivée d’un nouveau concurrent va redistribuer les cartes, d’autant plus qu’Atel vise 937 000 abonnés, soit 3 % de part de marché dès sa première année et jusqu’à 10 % à partir de quatre ans.

Apollinaire Compaoré, nouveau patron des patrons burkinabè

Apollinaire Compaoré © Jacques Torregano pour JA

Apollinaire Compaoré © Jacques Torregano pour JA

Le self-made-man burkinabè a été élu à la fin d’octobre à la présidence du Conseil national du patronat burkinabè. Soutenu par le Cercle des jeunes chefs d’entreprise, conduit par Mahamadi Savadogo (par ailleurs président de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina), le Conseil interprofessionnel des entreprises du Burkina (Cidef), qui rassemble 53 entreprises et représentait un chiffre d’affaires de plus de 600 milliards de F CFA (915 millions d’euros) en 2016, l’entrepreneur de 65 ans entend redonner au syndicat corporatiste des patrons ses lettres de noblesse. « Je m’engage à travailler avec tout le monde pour redorer le blason de l’institution », a confié Compaoré, désormais l’un des tycoons ouest-africains des télécoms.

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