Maroc : Jawjab, agence tous risques numérique

Formats variés, séries originales, réalisations bien léchées… Jawjab, filiale digitale de la société de production du cinéaste Nabil Ayouch, s’impose comme la boîte à idées la plus créative du web marocain.

Jawjab, c’est un ton décalé, volontiers impertinent, et un humour à double détente. © Naoufal Sbaoui pour JA

Jawjab, c’est un ton décalé, volontiers impertinent, et un humour à double détente. © Naoufal Sbaoui pour JA

CRETOIS Jules

Publié le 29 novembre 2018 Lecture : 3 minutes.

Le chef du gouvernement marocain, Saadeddine El Othmani, avec son prédécesseur, le secrétaire général du Parti justice et développement (PJD), Abdelilah Benkirane, lors d’un meeting électoral le 25 septembre 2016 à Rabat. © Abdeljalil Bounhar/AP/SIPA
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Ils sont une douzaine de salariés à s’affairer au rez-de-chaussée d’un immeuble de Bourgogne, quartier « classe moyenne » casaoui. Âge médian : autour de 25 ans. Youssef Ziraoui, directeur général de l’agence, quadra passé par plusieurs titres de la presse nationale, est tout sourire. Et il a de quoi, quelques jours après la réussite de la soirée de lancement de First Blood, une websérie sous forme de dessin animé consacrée à la délicate question des premières règles.

Terrain d’évolution de Jawjab : les réseaux sociaux, sur lesquels la filiale digitale d’Ali n’ Productions – du cinéaste Nabil Ayouch – se présente comme « le premier espace collaboratif consacré aux créateurs de contenu sur le web en Afrique du Nord ». Outre First Blood, on y trouve notamment Koun, une série d’entretiens avec des jeunes femmes qui racontent leur parcours. Quelques exemples parmi d’autres avec, pour dénominateur commun, un ton décalé, volontiers impertinent, et un humour à double détente.

Jawjab compte déjà parmi ses clients des institutions et des grands groupes tels que Saham, CIH Bank, Enmer, Avito, Sprite

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Le business model de Jawjab, lui, est tout ce qu’il y a de plus carré. Dès sa première année, emmenée par le journaliste et animateur de télévision Younès Lazrak (son directeur général adjoint de la mi-2016 à la mi-2017), la société était rentable ; son chiffre d’affaires se serait hissé à quelques centaines de milliers d’euros. Jawjab compte déjà parmi ses clients des institutions et des grands groupes tels que Saham, CIH Bank, Enmer, Avito, Sprite, auxquels elle propose ses services de production multimédia pour les accompagner dans leur stratégie numérique et leur volonté de cibler les plus jeunes et les internautes.

Cercle vertueux

Jawjab a aussi réussi son pari, en tant qu’incubateur, de produire des youtubeurs – animateurs, comédiens ou artistes – dont le talent est désormais reconnu, comme Amal El Madade, animatrice d’une émission de cuisine, Youssef Ksiyer, humoriste et chroniqueur, ou encore Bouchra Ddeau, une journaliste politique très controversée. Le ton comme le format sont totalement libres. « L’idée, c’est d’instaurer un cercle vertueux, explique Youssef Ziraoui. La notoriété de Jawjab doit servir les jeunes talents, qui, à leur tour, augmentent sa popularité auprès d’un public varié et exigeant. »

>>> À LIRE – Maroc : les web-séries de Hicham Lasri qui « dézinguent »

Dans son bureau tapissé d’affiches de cinéma (marocain et américain), Ziraoui est en plein brainstorming avec Ali, réalisateur, et Saad, directeur artistique ; man bun (chignon) pour l’un, casquette cubaine pour l’autre. La discussion est menée sur un ton léger, mais avec efficacité. Rapidement, le trio lance le tournage d’une tbourida (ou fantasia, charge spectaculaire de cavalerie traditionnelle) pour un client ­– « un gros portefeuille ». Ziraoui veut aussi traduire en interne la créativité qui fait la réputation de Jawjab. « Ici, on ne travaille pas en silo, à la verticale. On essaie de casser un peu la segmentation entre les métiers. » Une souplesse qui, assure-t-il, permet de « répondre à des commandes qui sont toujours pour hier ».

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Pointures

L’atypique agence multimédia a par ailleurs attiré des talents qui, s’ils ne passent pas à l’écran, n’en sont pas moins des pointures. Elle s’offre ainsi les services de directeur artistique du designer Achraf El Kouhen, connu pour ses participations à des projets de la scène culturelle alternative comme le fanzine L’Kounache.

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Jawjab est également active dans le monde en plein essor du native advertising (publicité intégrée, principalement en ligne, qui s’harmonise avec le contenu éditorial sur lequel elle apparaît), dont les principaux acteurs au Maroc sont Moustacho, Welovebuzz ou Buzzkito. Mais Youssef Ziraoui ne craint pas la concurrence. Il parie sur la qualité et l’originalité des contenus de Jawjab.

À ne pas rater

Maison de production et webtélé, l’agence semble n’être qu’un pure player (active uniquement sur internet), même si l’audiovisuel « classique » entre aussi dans le domaine de compétences de ses équipes et de son offre. En attendant de multiplier les terrains de jeu, les projets s’enchaînent sur les réseaux sociaux.

À ne pas rater, la série de sketchs courts lancée en septembre par le réalisateur Hicham Lasri, célèbre pour son univers original et ses longs-métrages (dont The Sea is Behind, en 2014) : un rendez-vous humoristique et intello, Tba3ssis en français (« La frime en français »), où il passe devant la caméra pour une petite leçon de vocabulaire.

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