Santé : les pays émergents dans le viseur du sud-africain Aspen
Après avoir cédé sa branche nutrition au français Lactalis, le groupe sud-africain Aspen entend se concentrer sur les médicaments. Rencontre avec son PDG, Stephen Saad.
Santé : des opportunités pour le secteur privé
Dans ce dossier, Jeune Afrique dresse un panorama du secteur de la santé sur le continent. Stratégies, innovations, résultats…
En septembre, le laboratoire pharmaceutique sud-africain Aspen cédait sa branche nutrition au groupe français laitier Lactalis pour 740 millions d’euros afin de se concentrer sur son cœur de métier : la pharmacie. C’est ainsi qu’il continue d’investir dans ses capacités de production. Le groupe a annoncé en octobre qu’il allait injecter 3,4 milliards de rands (216 millions d’euros) dans son unité de fabrication de Port Elizabeth, dans la province du Cap-Oriental.
Bien que l’Afrique du Sud continue d’être un centre de production et une source de revenus essentielle pour le groupe, l’expansion d’Aspen en Europe, en Chine ou en Amérique latine a été jusque-là bien supérieure à ce qu’elle est en Afrique du Sud et sur le reste du continent. Cependant, comme le déclare à Jeune Afrique Stephen Saad, fondateur et directeur général du groupe, « si les marchés africains n’ont pas atteint la taille critique de certains des autres territoires où le groupe est présent, les taux de croissance peuvent y être très élevés ».
Objectif : pays émergents
Aspen, dont les revenus, avec une augmentation de 3 %, ont atteint en 2018 42,6 milliards de rands, produit plus de 24 milliards de comprimés par an et dispose de 25 unités de fabrication réparties sur 17 sites. Il emploie plus de 10 000 personnes et vend ses produits dans plus de 150 pays. En Afrique subsaharienne, qui représente 23 % de son chiffre d’affaires, le groupe fournit des médicaments de marque ou des génériques, principalement en Afrique du Sud, mais aussi au Botswana, en Namibie, au Kenya, en Tanzanie, au Nigeria, au Ghana et en Ouganda.
L’activité Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) du groupe fournit des produits pharmaceutiques de marque mondiale et des marques locales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, notamment en Égypte, en Algérie, au Maroc et en Arabie saoudite, cette dernière représentant environ la moitié des ventes de la région.
« Notre vision stratégique de l’Afrique du Sud et de l’Afrique est qu’il existe un potentiel de croissance pour la simple raison que les gens veulent un meilleur accès aux médicaments » souligne Stephen Saad
La cession de l’activité nutrition à Lactalis permettra aux branches des régions Asie-Pacifique, Amérique latine et Afrique subsaharienne de se concentrer sur leurs activités pharmaceutiques principales. Par cette vente, Aspen ne diminue pas son attention sur l’Europe. L’Europe de l’Ouest représente 29 % de son chiffre d’affaires, plus que l’activité africaine du groupe, et l’Europe de l’Est, 7 %.
Outre ses investissements industriels en Afrique du Sud, il développe également ses capacités de fabrication sur ses sites en France et en Allemagne. Néanmoins, Aspen a pour principal objectif de se concentrer sur les pays émergents, où il détient des « positions solides » et où il prévoit de croître en augmentant ses volumes. Ses résultats financiers pour 2018 indiquent que les revenus générés par l’ensemble de ses produits ont enregistré une croissance nettement plus forte sur les marchés émergents que sur les marchés développés.
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L’Afrique reste un élément central de cette stratégie. « Notre vision stratégique de l’Afrique du Sud et de l’Afrique est qu’il existe un potentiel de croissance pour la simple raison que les gens veulent un meilleur accès aux médicaments, a déclaré Saad. Pour démontrer notre engagement, nous avons établi des capacités de production à Accra, Dar es-Salaam et Nairobi, où on souhaite commercialiser nos produits. »
Saad rappelle qu’Aspen a une forte présence en Afrique de l’Est grâce à Beta Kenya et Shelys Tanzanie, acquis en 2012 et qui sont des acteurs clés du secteur pharmaceutique pour les produits prescrits médicalement et pour ceux en vente libre. Deux fabricants qui fournissent une base pour l’expansion d’Aspen en Afrique centrale et en Afrique de l’Est, y compris pour les marques génériques.
Enregistrement des médicaments
Cependant, dans certains pays africains, les coupures de courant, la mauvaise qualité de l’eau et le manque de compétences pour répondre aux besoins du groupe sont un frein à son déploiement.
Par ailleurs, explique Saad, il y a aussi la question de l’harmonisation de l’enregistrement des médicaments, par exemple en Afrique de l’Est, ainsi que celle des notices, pour lesquelles les réglementations peuvent être différentes en fonction des pays. « Beaucoup d’entre eux, explique-t-il, ont un faible volume, et un enregistrement séparé peut être contraignant. Ce serait un changement très important pour le groupe si l’enregistrement harmonisé était plus largement accepté sur le continent. »
Les chiffres d’Aspen peuvent suggérer que, dans le portefeuille mondial d’Aspen, d’autres territoires sont de plus en plus dominants par rapport à ceux de l’Afrique. « Bien que la taille absolue du marché africain hors Afrique du Sud soit relativement petite, les taux de croissance en pourcentage sont élevés, et il n’y a aucune raison pour qu’ils ne soient pas parmi les plus élevés. »
Activités tanzaniennes
Le groupe a réalisé des investissements importants, en particulier au Kenya et en Tanzanie, et a transféré une partie de la fabrication dans les usines qu’il y a implantées, notamment pour les produits en vente libre. « Nous les utilisons également comme base pour nous implanter plus largement dans le reste de la région, et nous regardons plus loin en nous concentrant particulièrement sur l’Afrique de l’Est, a déclaré Saad. Nous sommes le plus grand fournisseur de médicaments en Tanzanie. »
Cependant, il faudra une croissance significative pour que les opérations africaines se rapprochent de celles de l’Afrique du Sud ou de l’Europe en matière de contribution aux revenus.
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Comme un certain nombre de sociétés sud-africaines, Aspen a indiqué avoir entendu l’appel du président, Cyril Ramaphosa, aux entreprises pour sortir le pays de la récession. Le laboratoire a ainsi annoncé « le plus gros investissement pharmaceutique » sud-africain, de 3,4 milliards de rands, dans la production d’anesthésiques stériles.
Néanmoins, des inquiétudes concernant la stabilité politique et économique persistent. Des préoccupations similaires concernent de nombreux États africains, en particulier la Tanzanie. Mais Saad reste optimiste pour les activités tanzaniennes et africaines du groupe.
Une position de leader
Le secteur pharmaceutique privé sud-africain était évalué à 42,9 milliards de rands pour le premier semestre de l’année 2018, selon Aspen. Le premier groupe pharmaceutique du secteur privé sud-africain détient une part de marché de 12,9 % en valeur, représentant une ordonnance sur cinq délivrée par des pharmaciens sud-africains et 6 des 25 plus grandes marques du secteur privé. Sa part dans la catégorie des anticoagulants injectables en Europe est restée stable, à 18 % à la fin de mai 2018.
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