Restitution du patrimoine africain : en France, les vieilles rancœurs resurgissent
Les conclusions du rapport Savoy-Sarr étaient à peine connues que déjà, en France, les esprits commençaient à s’échauffer.
La France restituera-t-elle son patrimoine à l’Afrique ?
En annonçant son intention de restituer rapidement aux pays africains la quasi-totalité des objets et œuvres d’art dont ils ont été dépossédés, Emmanuel Macron brise un tabou. Et suscite espoirs et polémiques.
Sans surprise, les journaux de droite (Le Point, Le Figaro) sont farouchement contre la restitution tandis que ceux de gauche (Libération, L’Humanité) saluent à la fois la qualité du travail et les mesures proposées.
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Chez les opposants, deux types d’argument prédominent. Premier argument, soutenu notamment par Stéphane Martin, le président du Musée du quai Branly, et Jean-Jacques Aillagon, l’ancien ministre de la Culture de Jacques Chirac, le travail des rapporteurs ne serait pas sérieux : pas assez d’avis contradictoires, de personnes et de pays consultés…
Restitutions permanentes contre prêts de longue durée
« Télécommandé » par Macron, le texte proposerait un « bricolage législatif » et serait l’expression de courants de pensée « partiaux, anachroniques, voire uchroniques » qui ne refléteraient que les « frustrations » d’une partie de la jeunesse et de l’intelligentsia africaines. « On nous dépeint comme des militants alors que nous sommes des universitaires, soupire Sarr. Toujours cette insupportable condescendance : dès qu’un Africain s’exprime, c’est forcément son affect qui parle… »
Le deuxième argument porte sur la recommandation des rapporteurs de procéder à des restitutions permanentes, et non, par exemple, à des prêts de longue durée. « Une mauvaise réponse à une question courageuse », s’agace Stéphane Martin. D’autres contestent l’idée selon laquelle les objets acquis l’auraient forcément été de manière inéquitable.
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Critiquant un texte « vicié et inopérant », le critique d’art Didier Rykner déplore que « les auteurs ne mettent pas en perspective la complexité de l’histoire coloniale ». Quant à l’avocat Yves-Bernard Debie, il s’étonne : « On présuppose que toute la période coloniale est par nature contrainte. » Étonnant étonnement !
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