Ligne ferroviaire Cotonou-Niamey : Pékin plutôt que Petrolin

Estimé à 1,2 milliard d’euros lorsqu’il a été porté sur les fonts baptismaux, en 2008, le chantier de la ligne de chemin de fer Cotonou-Parakou-Dosso-Niamey est stratégique pour la sous-région.

Un chantier routier au Bénin en novembre 2017. © Jacques Torregano pour JA

Un chantier routier au Bénin en novembre 2017. © Jacques Torregano pour JA

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Publié le 24 janvier 2019 Lecture : 4 minutes.

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Si ce n’est que, dix ans plus tard, ce projet de dorsale Bénin-Niger a des allures de serpent de mer et semble avoir bien du mal à sortir de la voie de garage sur laquelle les multiples épisodes judiciaires l’ont conduit. Pour l’instant, côté nigérien, 143 km de rails ont effectivement été posés (par Bolloré Africa Logistics) entre Niamey et Dosso.

Reste 450 km à construire pour atteindre les 594 km de cette extension prévue entre la capitale nigérienne et Parakou (nord du Bénin). Côté béninois, la seule réalisation sortie de terre est le port sec de Parakou, construit au bout des 438 km de rails que le projet prévoit de réhabiliter entre la deuxième ville du pays (320 000 habitants) et Cotonou, la capitale économique.

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Travaux à l’arrêt

La plateforme multimodale, qui s’étend sur 50 hectares, est opérationnelle depuis bientôt quatre ans, mais elle attend toujours les premiers trains… « Tout est prêt, mais les travaux sont à l’arrêt. Nous avons bon espoir qu’ils redémarreront bientôt puisque Patrice Talon et Mahamou Issoufou se sont enfin entendus », espère Charles Toko, maire de Parakou et proche du président béninois.

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Bataille judiciaire

Lancé en 2008, l’appel d’offres avait été remporté par le groupe béninois de l’homme d’affaires Samuel Dossou, Petrolin, auquel le marché avait été retiré en 2013 au profit du groupe français Bolloré. S’en est suivie une longue bataille judiciaire jusqu’à ce qu’en octobre 2017 la justice béninoise rétablisse Petrolin dans ses droits.

En mars 2018, au terme d’âpres négociations entre les autorités béninoises et nigériennes, Samuel Dossou a cependant accepté de céder le marché à China Railway Construction Corporation Limited (CRCC) en échange de la promesse d’obtenir la construction du port en eau profonde de Sèmè-Kpodji, situé entre Cotonou et Porto-Novo. C’est donc CRCC, déjà actif sur le projet de TGV au Nigeria, qui réhabilitera les 438 km de voie ferrée entre Parakou et Cotonou.

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Droit de réponse de M. Samuel Dossou

Suite à la publication de cet article, Samuel Dossou, président de la société Petrolin S.A. nous a adressé le droit de réponse suivant, que nous publions ci-dessous : 

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« Le journal Jeune Afrique, dans sa parution N 03028 du 20 au 26 janvier 2019, a affirmé ce qui suit « En mars 2018, au terme d’âpres négociations entre les autorités béninoises et nigériennes, Samuel Dossou a cependant accepté de céder le marché à China Railway Construction Corporation Limited (CRCC) en échange de la promesse d’obtenir la construction du port en eau profonde de Sémé-Kpodji, situé entre Cotonou et Porto-Novo. »

Cette information publiée par Jeune Afrique est gravement inexacte. Le Groupe Petrolin n’a jamais négocié, ni accepté de céder ses droits sur le corridor ferroviaire Cotonou-Niamey en contrepartie d’une quelconque « promesse » sur le port de Sémé-Podji et dément formellement ces allégations.

Si, tel que publié dans le magazine Challenge le 19 mars 2018, le Chef de l’État béninois le Président Patrice TALON « affirme avoir déjà obtenu « l’accord de principe » des autorités chinoises pour examiner la faisabilité du projet ferroviaire qui auraient chiffré le coût du tronçon allant de Cotonou à la frontière de Niger, soit 740 kilomètres : 4 milliards de dollars », le Groupe Petrolin, n’a à ce jour, connaissance d’aucun accord écrit sur le sujet.

Pour rappel, l’appel d’offres international ouvert N 05498 lancé par les États du Bénin et du Niger, copropriétaires de la ligne ferroviaire Cotonou-Parakou-Dosso-Niamey, a retenu le Groupe Petrolin comme adjudicataire du corridor en 2010, situation définitivement clarifiée en septembre 2017 par la décision de la Cour Suprême de la République du Bénin qui a rétabli Petrolin dans ses droits à la suite d’une tentative illégale d’expropriation par un partenaire.

Le journal Jeune Afrique aurait pu faire état de la qualité des travaux de réalisation du port sec de Parakou avec ses connexions au réseau routier et ferroviaire national conformes au standard recherché aujourd’hui en Afrique contrairement aux « 143 km de rails […] posés (par Bolloré Africa Logistics) » au Niger auxquels fait référence l’article.

Le port pétrolier, minéralier et commercial en eau profonde de Sèmè-Podji a été attribué à Petrolin et sa filiale chargée des infrastructures, en l’occurrence la société PIC Network Limited, en janvier 2010 par la Convention Cadre de Partenariat Public-Privé et d’Investissement entre la République du Bénin et la société PIC Network Limited, approuvée par décret (N 0 2010-212 du 25 Janvier 2010).

Cette convention a été renforcée en décembre 2011 par la Convention Particulière relative à la construction du port pétrolier, minéralier et commercial en eau profonde à Sèmè-Podji entre la République du Bénin et la société PIC Network Limited et la société PIC International SA, filiale béninoise et concessionnaire du port approuvée par décret (N 0 2011-794 du 09 décembre 2011).

Les discussions en cours avec les autorités béninoises concernent l’indemnisation des ayants-droits des terrains que le Groupe Petrolin a accepté de préfinancer en lieu et place de l’État béninois et la mise à disposition effective par celui-ci du terrain de 1006 hectares afin de permettre au Groupe Petrolin de procéder au démarrage de la construction du port. Petrolin a obtenu depuis décembre 2016 un certificat d’impact environnemental et social répondant aux critères internationaux.

Contrairement à ce qu’affirme Jeune Afrique, il n’y a aucune promesse d’échange entre les rails et le projet du port en eau profonde.

Pour la compréhension du Projet Épine Dorsale, il est bon de retenir qu’il consiste en un vaste programme d’infrastructures ferroviaires, portuaires, aéroportuaires et routières interdépendantes, régi par la Convention Cadre de Partenariat Public Privé avec l’État du Bénin. Il s’agit d’un projet d’intégration régionale entre le Bénin, les pays de l’hinterland (le Burkina Faso, le Mali, le Niger) et le Nord du Nigeria conçu, lancé et promu par le Groupe Petrolin qui dispose de bases contractuelles légales et juridiques solides et dont il a déjà concrétisé de nombreuses réalisations sur le terrain.

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