Capital-investissement : le malgache Axian poursuit sa diversification

En se lançant dans le « private equity », le conglomérat malgache Axian, de la famille Hiridjee, entend élargir son empreinte géographique et réduire son exposition aux risques.

Le groupe d’abord présent dans le textile s’est peu a peu diversifié. En 2018, il a racheté avec Xavier Niel l’opérateur Tigo Sénégal. © Afolabi Sotunde/REUTERS

Le groupe d’abord présent dans le textile s’est peu a peu diversifié. En 2018, il a racheté avec Xavier Niel l’opérateur Tigo Sénégal. © Afolabi Sotunde/REUTERS

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Publié le 20 février 2019 Lecture : 5 minutes.

En vingt mois, le conglomérat malgache Axian a injecté plusieurs dizaines de millions d’euros dans cinq fonds d’investissement africains. À la mi-2017, il a signé une toute première mise au pot : 12 millions d’euros dans Adenia Capital IV. Ont suivi des investissements dans les nouveaux véhicules d’Emerging Capital Partners, de Partech Africa (start-up) et du malgache Miarakap (TPME). Au début de février, il a investi dans Amethis Fonds II, qui vise 350 millions d’euros d’ici à la fin mai.

Cette effervescence a surpris. D’abord parce qu’il s’agit d’une nouvelle activité pour le groupe contrôlé par la famille Hiridjee et actif sur la Grande Île depuis cent cinquante ans. Initialement présent dans le textile, il s’est orienté ensuite vers les produits pétroliers et l’énergie (Jovenna, Électricité de Madagascar), l’immobilier (First Immo), les télécoms (Telma) et la banque (BNI Madagascar).

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Investissements transparents

Ensuite par le caractère très public de ces investissements, souvent relayés par communiqués. Les family offices, ces gestionnaires de fortune familiale, représentent environ 8 % des bailleurs de fonds du secteur en Afrique, selon un sondage publié en janvier 2019 par l’association panafricaine du capital-investissement (Avca). Leur identité est pourtant jalousement gardée, et leurs interventions réalisées en catimini. Le conglomérat malgache a, lui, choisi le chemin inverse.

Le capital-­investissement est le meilleur observatoire du business en Afrique.

Pour son management, il existe une continuité naturelle entre cette nouvelle activité du groupe et les autres, plus anciennes. « Le capital-­investissement est le meilleur observatoire du business en Afrique. Avec nos partenaires du private equity, nous pouvons collaborer sur des coïnvestissements dans des entreprises déjà dans leurs portefeuilles, racheter ces dernières ou planifier ensemble des acquisitions externes », décrypte Hassane Muhieddine.

Débauché fin 2016 de Crédit agricole, le manager français dirige le nouveau pôle services financiers d’Axian. « Nous avons désormais une présence indirecte dans 34 pays à travers 50 entreprises gérées par nos partenaires », complète celui qui siège au conseil d’administration d’Adenia Capital IV et au comité d’investissement de Miarakap.

Partenaires

Depuis cinq ans, Axian a fait du coïnvestissement son outil privilégié de croissance externe. En 2015, le groupe s’est associé aux sociétés du milliardaire français Xavier Niel pour se lancer à Mayotte et à La Réunion, puis, en 2018, pour racheter Tigo Sénégal. Cette fois en trio avec Yérim Sow (Teyliom). Sa percée dans les énergies renouvelables est menée avec GreenYellow, filiale du français Casino (grande distribution), avec qui il construit une ferme solaire de 20 MW à Ambatolampy, à 60 km d’Antananarivo.

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Il est possible d’ailleurs de relier l’attrait d’Axian pour le capital-investissement au rachat, en 2014, de BNI Madagascar. Il a été réalisé en partenariat avec le holding financier mauricien Ciel Limited. Ce dernier contrôle depuis 2008 Kibo Capital Partners (100 millions de dollars d’actifs). Depuis 2015, Ciel et Amethis sont associés dans Ciel Finance, qui regroupe leurs participations dans BNI Madagascar, au conseil d’administration duquel ils côtoient Véronique Perdigon, collaboratrice de longue date de Hassanein Hiridjee, codirecteur général d’Axian.

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Avec ses nouveaux partenaires du private equity, Axian entend poursuivre « la diversification sectorielle et géographique de ses activités, ainsi que réduire son exposition aux risques-pays », complète Hassane Muhieddine. Adenia Partners, particulièrement présent sur la côte est du continent et plus récemment en Afrique de l’Ouest, investit le plus souvent aux côtés d’entrepreneurs, en tant qu’actionnaire majoritaire ou dans le cadre de rachat par la direction (MBO).

Ses coupons sont souvent compris entre 5 millions et 15-20 millions d’euros. Amethis privilégie en revanche des participations minoritaires, entre 15 millions et 30 millions d’euros, mais dispose d’une plus forte présence dans l’ouest et le nord du continent. Acteur majeur du secteur, ECP se positionne en revanche sur des tickets d’investissements moyens de 90 millions de dollars. « Partech offre une bonne visibilité sur le mobile money, le big data, l’intelligence artificielle », décrypte Hassane Muhieddine. Enfin, avec Miarakap, consacré aux petites entreprises ­malgaches, et ses coupons compris entre 20 000 et 300 000 euros, le groupe « ne recherche pas nécessairement le rendement, mais un impact et une meilleure visibilité du business en général », poursuit le manager.

La santé et l’éducation en ligne de mire

Le conglomérat estime que « les synergies et l’accès à un écosystème diversifié » attendus de sa percée dans le capital­-investissement portent déjà leurs fruits à travers la plupart des secteurs d’activité du conglomérat. L’alliance avec Partech se profile, selon Axian, comme un accélérateur de la croissance de sa plateforme malgache de services financiers sur mobile, Mvola, qui revendique 2,5 millions d’utilisateurs actifs à Madagascar et doit être déployée bientôt aux Comores.

Les fonds soutenus par Axian ont également été sondés, pour un appui en fonds propres ou en dette, dans le cadre d’un projet d’électrification rurale que le groupe malgache veut déployer en Côte d’Ivoire, en partenariat avec Sagemcom.

Nous n’excluons pas de développer de nouveaux secteurs

Enfin, selon nos informations, Axian a été sollicité par l’un des fonds qu’il soutient, dans le cadre de la diligence raisonnable (due diligence) pour un projet d’investissement dans le secteur bancaire – ce dernier n’a toutefois pas abouti. Le contact avec les capital-investisseurs semble avoir aussi affecté la stratégie globale d’Axian. « Nous n’excluons pas de développer de nouveaux secteurs, avec des besoins qui ne sont pas couverts et dans lesquels il y a beaucoup de choses à faire », avance Hassane Muhieddine.

Lesquels ? « La santé et l’éducation. » Ils se classent en troisième et cinquième position des domaines plébiscités par les gestionnaires de fonds africains, sondés par Deloitte fin 2017. Simple coïncidence ?

Une gouvernance très familiale

Hassanein Hiridjee. © DR

Hassanein Hiridjee. © DR

Après des décennies de croissance hétéroclite, les activités des Hiridjee – famille française d’origine indienne, établie à Madagascar depuis le XIXe siècle – ont été réorganisées fin 2015 en une nouvelle structure nommée Axian. Le groupe reste contrôlé par la famille. Les deux frères Amin et Hassanein (photo) – fils de feu Rosanaly, décédé en 1991 – sont les codirecteurs généraux. Leurs oncles Bashir et Razaly Hiridjee sont coprésidents du conseil d’administration. Les quatre membres de la famille sont les seuls actionnaires indiqués par le groupe.

Xavier Niel, partenaire et mentor

« Telma et le groupe de Xavier Niel partagent un même ADN entrepreneurial […]. Il y a donc une volonté commune de faire d’autres projets ensemble », expliquait en 2015 Hassanein Hiridjee, codirecteur général d’Axian. Prédiction réalisée. Outre leur reprise, en commun, d’actifs télécoms à La Réunion, à Mayotte et aux Comores, ils ont repris en 2018, en partenariat avec Yérim Sow, Tigo Sénégal.

L’influence de Xavier Niel transparaît encore plus dans Nexta. Axian compte lancer d’ici à juin cette plateforme d’accompagnement des start-up et PME (coworking, mentorat, formation et financement). « Une sorte de Station F locale », selon un porte-parole du groupe, en référence au campus de start-up inauguré par Niel en 2017 à Paris.

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