« Bagdad Station » et « Amal » : la kamikaze et la rebelle, deux femmes que tout oppose
Sara est irakienne, Amal est égyptienne. L’une appartient à la fiction, l’autre à la réalité. Leurs parcours se répondent sur grand écran.
Sara pénètre dans la gare centrale de Bagdad. Elle ne vient pas prendre le train. En ce jour où l’on exécute Saddam Hussein, elle est décidée à se faire exploser au milieu de la foule.
Cherchant l’endroit et le moment idéaux pour commettre son attentat-suicide, la jeune kamikaze entre en contact direct avec ses futures victimes dans ce lieu propice aux rencontres inattendues : des orphelins attachants qui se débrouillent comme ils peuvent pour survivre sur les quais, un vendeur ambulant qu’elle prend en otage et qui tente de la dissuader d’agir, une fille-mère désespérée qui veut offrir son nouveau-né à n’importe quel passant… Bien que déterminée, Sara peut-elle encore passer à l’acte dans de telles circonstances ?
De déceptions en désillusions
Amal, adolescente du Caire, est, elle, pleine d’espoir au début du documentaire que lui consacre Mohamed Siam, qui a suivi son parcours caméra au poing pendant cinq ans, de 2011 à 2015. Un peu garçon manqué, n’en faisant qu’à sa tête, négligeant ses études, elle arpente jour et nuit la place Al-Tahrir, n’hésitant pas à provoquer les policiers peu accommodants qui font face aux manifestants.
Mais, dans cette Égypte qui va rétablir un pouvoir autoritaire après avoir congédié Moubarak, elle court de déceptions en désillusions et, à peine adulte, finira mariée, voilée, enceinte. Tout en affirmant qu’elle ne renonce pas à un combat émancipateur qu’elle entend désormais mener « de l’intérieur », elle songe alors à devenir… policière.
Deux femmes fortes que tout oppose
Voilà deux parcours de jeunes femmes qu’apparemment tout oppose. Quoi de plus éloigné a priori qu’une kamikaze islamiste prête à provoquer une tuerie et une démocrate éprise de liberté individuelle ? Mais toutes deux resteront des femmes fortes tout en abandonnant, la première en l’espace de quelques heures, la seconde au bout de quelques années, leur projet primordial.
Ce qui permet aux réalisateurs, manifestement fascinés par leurs « héroïnes », de proposer des portraits saisissants de femmes d’aujourd’hui face à leur destin. Avec de tels films, il est courant que la fiction l’emporte sur la réalité. Mais grâce à sa protagoniste d’un incroyable naturel, Amal, malgré sa fin peu optimiste, demeure pour le coup un long-métrage plus convaincant que Baghdad Station.
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