Législatives en Guinée-Bissau : vers la revanche de Domingos Simões Pereira sur José Mário Vaz ?

Les législatives mettront-elles fin à plus de trois ans de crise politique ? La confrontation entre José Mário Vaz, le président de la République, et Domingos Simões Pereira, l’ancien Premier ministre, est l’un des enjeux de cette campagne.

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Publié le 5 mars 2019 Lecture : 3 minutes.

« Notre parti a retiré tout soutien au président de la République. Plus rien ne nous lie », affirmait, en novembre dernier, Domingos Simões Pereira, dit DSP, dans les colonnes de JA. Entre le patron du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), 55 ans, et José Mário Vaz, alias Jomav, le président sortant, 61 ans, la rupture est en effet totale depuis que le second a évincé le premier il y a plus de trois ans.

Les législatives du 10 mars résoudront-elles l’interminable crise politique dans laquelle se débat le pays ? La confrontation de ces irréductibles adversaires, certes indirecte, est l’un des enjeux de cette campagne, dont l’issue pourrait être décisive.

José Mário Vaz au siège du Parti Africain de l'Indépendance de Guinée et Cap Vert, le 3 mars 2014. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

José Mário Vaz au siège du Parti Africain de l'Indépendance de Guinée et Cap Vert, le 3 mars 2014. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

Leur mésentente croît rapidement, en raison, notamment, d’une répartition trop concurrentielle du pouvoir

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Une mésentente rapide

Lorsque leur animosité éclate au grand jour, en août 2015, les deux hommes, l’un et l’autre issus du PAIGC, sont au pouvoir depuis peu. L’année précédente, Jomav a été élu à la présidence et, après la victoire de l’ex-parti unique aux législatives, DSP est devenu Premier ministre.

Leur mésentente croît rapidement, en raison, notamment, d’une répartition trop concurrentielle du pouvoir. Dans ce régime bicéphale, le chef de l’État est le commandant suprême des armées, tandis que le Premier ministre détient le pouvoir exécutif et conduit la politique générale.

Le 12 août 2015, Jomav annonce qu’il limoge DSP, en accusant son gouvernement de corruption. Un prétexte, pour les proches de l’intéressé, qui dénoncent une décision abusive.

Depuis, le pays est dans l’impasse. Six Premiers ministres se sont succédé. Et les sanctions que la Cedeao a adoptées au début de 2018 à l’encontre de dix-neuf personnalités, dont le fils du président, accusées d’alimenter la crise, n’y ont rien changé. Rapidement levées, elles n’ont pas empêché le report de ces législatives, initialement prévues en novembre dernier.

Si le PAIGC l’emportait, DSP serait de facto en position de redevenir Premier ministre…

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Un air de déjà-vu

Beaucoup espèrent donc que le scrutin du 10 mars, avec la remise en jeu du mandat des 102 députés de l’Assemblée nationale populaire, permettra à la Guinée-Bissau de repartir sur de nouvelles bases. Ce scrutin pourrait toutefois avoir un air de déjà-vu : si le PAIGC l’emportait, DSP serait de facto en position de redevenir Premier ministre…

L’ex-parti unique devra toutefois commencer par affronter ses frondeurs. En août dernier, plusieurs dissidents ont en effet créé leur propre formation, baptisée « Madem G-15 » en référence aux quinze membres et députés du parti qui avaient préféré Jomav à DSP, faisant ainsi perdre au PAIGC sa majorité absolue au Parlement. « Ils sont uniquement animés par un esprit revanchard », estime João Bernardo Vieira, porte-parole du PAIGC. « Faux, rétorque Umaro Sissoco Embalo, numéro deux du Madem G-15 et ancien Premier ministre de Jomav. Il y a plusieurs années que le PAIGC n’apporte rien de nouveau. »

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>>> À LIRE – Guinée-Bissau : 4 questions pour comprendre la crise politique

Mais le Madem G-15 et le président, que leur opposition au PAIGC avait un temps rapprochés, ont pris leurs distances. Selon plusieurs sources, le chef de l’État, dont l’isolement va croissant, tente d’obtenir l’appui du Parti de la rénovation sociale (PRS), le principal mouvement d’opposition, pour briguer un second mandat lors de la présidentielle de 2019 – dont on ne connaît toujours pas la date exacte. Y parviendra-t-il ? Rien n’est moins sûr, car le parti du défunt président Kumba Yala fait campagne avec la ferme intention d’incarner le changement…

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