Espagne-Afrique : des investissements au-delà du Maroc

Si Rabat demeure un partenaire privilégié pour Madrid, les échanges avec l’Afrique subsaharienne vont croissant, notamment dans le domaine des énergies renouvelables.

Gouda Wind Farm est le premier parc éolien installé par Acciona en Afrique du Sud, à 100 km de Cape Town. © Keith Quixley/Acciona

Gouda Wind Farm est le premier parc éolien installé par Acciona en Afrique du Sud, à 100 km de Cape Town. © Keith Quixley/Acciona

Publié le 7 mars 2019 Lecture : 3 minutes.

Le Maroc vu de l’Espagne © Wikimedia Commons CC BY-SA 3.0 Maksim
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Espagne-Afrique : à l’heure des retrouvailles

L’Espagne redécouvre l’Afrique. Bien sûr, elle en connaît depuis longtemps les côtes qu’elle voit sans difficulté par temps clair. Et, d’Al-Andalus à Ceuta et Melilla, les confettis marocains hérités de la Reconquista, les liens culturels et économiques qu’entretient de longue date la péninsule avec ses proches voisins du Maghreb ont largement contribué à façonner les sociétés des deux côtés de la Méditerranée. Mais pour l’Espagne, l’un des rares pays d’Europe à faire géographiquement partie de l’Afrique, l’Histoire se conjugue toujours au présent sur le continent.

Sommaire

Palais des Congrès d’Ifema, à Madrid, le 24 janvier 2019. La 10e édition du Forum touristique sur les investissements et les opportunités d’affaires en Afrique (Investour) revêt un intérêt tout particulier. Cette année, 28 ministres africains ont fait le déplacement – établissant un nouveau record après les 23 venus l’an passé –, et le nombre de participants en provenance du continent africain a augmenté de 15 %.

« L’Espagne veut être un référent touristique pour les pays africains », insiste Reyes Maroto, la ministre de l’Industrie, du Commerce et du Tourisme, dans son discours d’ouverture, alors que le rendez-vous annuel est aujourd’hui incontournable pour les entreprises espagnoles, leaders mondiaux dans le secteur touristique, et plus que jamais à l’affût d’investissements en Afrique.

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Plombé par la crise économique entre 2008 et 2014, le secteur privé espagnol cherche de nouvelles perspectives de développement. L’Afrique semble lui offrir des opportunités alléchantes, boostée par une croissance attendue à 4,1 % en 2020 et par la création d’une zone de libre-échange continentale (Zlec) à l’échelle des pays membres de l’Union africaine (UA). Certes, seul 0,3 % de l’investissement brut extérieur espagnol était consacré au continent africain en 2017, mais les exportations ont augmenté de 67 % entre 2010 et 2017, pour dépasser de 3 milliards d’euros celles destinées à l’Amérique latine l’année dernière.

Chambre de commerce hispano - sud-africaine

Si le Maroc reste, et de loin, le premier partenaire commercial de l’Espagne en Afrique, recevant à lui seul 40 % des entreprises présentes sur le continent et 60 % des investissements directs étrangers (IDE) en provenance de la péninsule, les échanges avec le reste de l’Afrique ne cessent d’augmenter. Plus de 600 sociétés espagnoles sont physiquement actives en Afrique subsaharienne, soit 38 % du total des implantations hispaniques sur le continent.

Bien qu’ils soient encore loin des 14 milliards d’euros réalisés en moyenne chaque année avec le Maroc, les échanges commerciaux avec le reste du continent ne cessent d’augmenter. Comme avec l’Afrique du Sud, avec laquelle ils ont dépassé les 2,4 milliards d’euros en 2017, résultat d’une coopération croissante entre les deux pays illustrée par l’ouverture, l’année précédente, d’une chambre de commerce hispano - sud-africaine.

Plus de 4 500 entreprises espagnoles exportent aujourd’hui vers le marché sud-africain, notamment dans le secteur des énergies renouvelables. Près de 40 % de l’électricité ainsi produite en Afrique du Sud sort d’une unité installée par une entreprise espagnole.

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Un véritable savoir-faire sur lequel compte bien s’appuyer l’Espagne, au moment où les pays de la Cedeao prêtent une oreille plus qu’attentive à ce genre de projet. La sous-région dans son ensemble affiche l’ambition de voir les énergies renouvelables atteindre les 48 % dans son mix énergétique à l’horizon 2033. « C’est le secteur qui représente le plus de débouchés économiques pour nos entreprises », souligne José-Ramón Ferrandis Muñoz, chef du département Afrique au secrétariat d’État espagnol au Commerce.

Les PME en première ligne

Après avoir déjà participé à la réalisation de la centrale solaire Noor, au Maroc, les entreprises espagnoles multiplient les projets d’envergure. En Namibie, Alten Africa, filiale d’Alten Energías Renovables, l’un des plus importants producteurs indépendants d’électricité au monde et en Afrique, a démarré la commercialisation de l’électricité produite par la centrale solaire en marche depuis septembre au sud de Windhoek. D’une capacité de 45,5 MW, c’est l’une des plus puissantes aujourd’hui installées sur le continent.

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Les entreprises hispaniques se montrent également offensives dans les secteurs de l’eau et de l’agriculture, mais c’est encore dans la filière énergétique qu’elles sont le plus mises à contribution, « avec de nombreuses infrastructures à construire dans le transport terrestre comme dans la production d’électricité au Sénégal, au Ghana ou encore en Ouganda », explique Jesús Sierra, directeur régional pour l’Afrique et le Moyen-Orient chez Acciona. Le champion des énergies renouvelables est un cas particulier dans le secteur privé espagnol, puisqu’il est l’un des rares membres de l’Ibex 35 – le CAC 40 espagnol – implanté en Afrique subsaharienne.

>>> À LIRE – Eaux usées : l’espagnol Salher mise sur l’Afrique subsaharienne

« Les principaux groupes espagnols ne veulent pas prendre de risques, et, de fait, ce sont les PME spécialisées qui sont le plus souvent retenues lors des appels d’offres », confirme Rafael Gómez-Jordana Moya, conseiller chez K2 Intelligence, qui accompagne de nombreuses entreprises espagnoles en Afrique.

Comme la compagnie aérienne Binter Canarias, qui dessert déjà neuf destinations depuis les Canaries et qui vient d’annoncer l’ouverture prochaine de deux lignes en direction du Ghana et de la Côte d’Ivoire. Comme pour mieux soutenir les ambitions affichées par le ministre espagnol du Tourisme en début d’année.

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