Conseils d’administration : « la mixité augmente les performances financières »
Auteure du rapport « Women Matter », Sandra Sancier-Sultan, directrice associée senior chez McKinsey, a étudié les effets positifs de la présence des femmes dans les conseils d’administration.
Africa CEO Forum 2019 : enjeux et défis de l’intégration africaine
Les 25 et 26 mars à Kigali, 1 600 décideurs venus de 70 pays se réuniront à l’occasion de la septième édition de l’Africa CEO Forum, placée sous le signe de l’intégration africaine.
Jeune Afrique : Pourquoi certaines entreprises réussissent-elles à diversifier davantage leurs effectifs que d’autres ?
Sandra Sancier-Sultan : D’abord, il faut que les dirigeants soient convaincus que cette question est centrale et qu’ils décident d’en faire une priorité. La mixité doit être pilotée comme un objectif stratégique au même titre que pourraient l’être la digitalisation, l’analyse de données ou la diversification des activités. Cela doit se traduire par un suivi rigoureux et chiffré du pourcentage de femmes promues et recrutées, mais aussi par de la formation et du mentorat. Enfin, il faut prendre à bras-le-corps le sujet des comportements et de la culture de l’entreprise.
Ces bonnes pratiques s’observent tout aussi bien en Afrique que dans le reste du monde. Mais, sur le continent, 25 % des dirigeants d’entreprise considèrent encore la mixité comme un sujet accessoire. Pourtant, les entreprises qui comptent le plus de femmes dans leur boards ont une performance financière plus de 20 % supérieure à la moyenne. L’écart de performance entre celles qui en comptent le plus et celles qui n’ont aucune femme au conseil d’administration atteint 40 % de l’Ebit, (bénéfices avant intérêts et impôts). Il y a donc une corrélation entre diversité et performance financière.
La mixité ne doit pas être qu’une affaire de femmes
Cette conviction doit-elle être portée par les femmes ?
La mixité ne doit pas être qu’une affaire de femmes. L’initiative doit venir des dirigeants, hommes ou femmes, dans la mesure où la promotion de la diversité est bénéfique pour leur business. En revanche, pour assurer la progression professionnelle des femmes, il est évident que les jeunes recrues féminines auront besoin de se projeter sur des modèles de femmes exerçant des responsabilités, ce qui enclenchera une dynamique de promotion efficace.
Ce sujet est fondamental puisque, en moyenne, les entreprises africaines analysées en 2016 comptaient 47 % de femmes au bas de l’échelle hiérarchique, mais seulement 40 % au niveau du management intermédiaire et 29 % au niveau du management senior.
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Être l’unique femme dans une pièce réduit la propension de celle-ci à intervenir et à être écoutée
L’attitude envers les femmes sur leur lieu de travail est perçue par ces dernières comme la principale barrière à leur réussite. Comment cela s’exprime-t-il au quotidien ?
Cette réalité n’est pas seulement propre au continent. Partout ailleurs on observe un décalage entre ce que perçoivent les femmes de la réalité de leur environnement de travail, de la culture et des comportements, et ce que perçoit le reste de l’entreprise. Sans arriver aux comportements extrêmes, comme le harcèlement ou l’ostracisme, cela s’exprime par des attitudes biaisées face à la différence.
On sait, par exemple, qu’hommes et femmes projettent leur propre parcours sur leurs semblables. Si un comité d’évaluation et de nomination est davantage masculin, lorsqu’il évalue un candidat, il aura tendance à parler de son « potentiel ». Pour une candidate, au contraire, il sera plus enclin à chercher des preuves de ce qu’elle a déjà démontré.
Cela se manifeste aussi par le fait d’être la seule personne différente dans son environnement. Être l’unique femme dans une pièce réduit la propension de celle-ci à intervenir et à être écoutée. Ces exemples doivent pousser les entreprises à agir par le biais de la formation et de la mise en place de dispositifs internes offrant toutes les garanties de neutralité.
- Sandra Sancier-Sultan animera l’atelier « Women in Business », dont le thème sera la mise en œuvre d’une « charte du genre ».
Plus d’informations sur le site : https://www.theafricaceoforum.com/fr/.
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