Législatives au Bénin : Patrice Talon pousse Adrien Houngbédji vers la sortie

En refusant de faire fusionner son parti avec l’un des deux blocs pro-Talon, Me Adrien Houngbédji avait remporté un premier round face au président. Un triomphe éphémère, puisque le voilà exclu des législatives. Après trente ans d’engagement politique, l’homme fort de Porto-Novo serait-il poussé vers la sortie ?

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Fiacre Vidjingninou

Publié le 17 avril 2019 Lecture : 2 minutes.

Une femme vote au Bénin, lors du premier tour de la présidentielle, le 6 mars 2016 (archives). © Valentin Salako / AP / SIPA
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Législatives au Bénin sans l’opposition : les enjeux d’un scrutin inédit

Les Béninois sont appelés aux urnes, dimanche 28 avril, pour des législatives inédites dans le pays depuis l’instauration du multipartisme : aucune liste d’opposition ne participe à ce scrutin. Un « recul de la démocratie et de l’État de droit », pour l’opposition, accusée par la mouvance présidentielle de n’avoir « pas été à la hauteur des exigences des nouvelles lois ».

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C’est en effet la première fois depuis 1990 que ni Houngbédji ni son Parti du renouveau démocratique (PRD) ne participeront à des élections législatives. Celui qui achève son troisième mandat en tant que président de l’Assemblée nationale ne sera donc plus député. Le 5 mars, la Commission électorale nationale autonome (Cena) a rejeté le dossier de candidature du PRD, pour « usage de faux documents et doublons de candidats avec une liste concurrente », le logeant à la même enseigne que tous les partis d’opposition.

Failles et irrégularités

Choquée, la formation de Houngbédji s’est pourvue devant la Cour constitutionnelle, montrant, pièces à l’appui, les failles et irrégularités qui entachent selon elle les dossiers des deux blocs de la mouvance présidentielle. « Cela a valu quelques ennuis à Houngbédji, puisqu’il a été entendu, avec l’un de nos vice-présidents, par la brigade criminelle de Cotonou », affirme un militant du PRD.

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Talon et Houngbédji ont néanmoins tenté de sauver les apparences. Le 6 mars, le premier a confié au second une mission de médiation avec l’opposition. Mais le 1er avril, lors de leur réunion plénière, les députés n’ont pu s’entendre ni sur des propositions de lois relatives au nouveau code électoral ni sur la charte des partis politiques, que le PRD a votées et qui sont à l’origine de la crise.

30px;text-align:>>> À LIRE – Bénin : Adrien Houngbédji interrogé à son domicile, son parti débouté par la Cour constitutionnelle

Après l’échec de ces négociations, Houngbédji est apparu une dernière fois, le 1er avril, comme animateur d’une concertation entre Patrice Talon et le Collectif des présidents des institutions constitutionnelles. Le communiqué final a appelé à la « poursuite du processus électoral et à la tenue des élections à la bonne date ». Houngbédji avait-il d’autre choix ? « Il a manifestement accepté son sort, et le silence qu’il observe depuis cet épisode montre qu’il n’a pas de solution », estime Hervé Ballo Guédé, un analyste indépendant.

En l’absence de réaction officielle du PRD, les langues se délient dans les sections locales. Le mouvement des cadres de la 6e circonscription, par exemple, accuse le camp Talon de n’avoir pas joué franc jeu. « Il n’y aura pas d’élection sans le PRD et les partis d’opposition », a lancé Christian Parfait Ahoyo, délégué général chargé des TIC au sein de la direction exécutive nationale du parti. À l’évidence, le maintien de l’unité du PRD sera difficile à préserver.

L’arrivée au pouvoir de Patrice Talon a viré au cauchemar pour les formations qui ont dominé l’échiquier politique ces vingt-cinq dernières années

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L’arrivée au pouvoir de Patrice Talon a viré au cauchemar pour les formations qui ont dominé l’échiquier politique ces vingt-cinq dernières années : le PRD, la Renaissance du Bénin (RB) du couple Soglo ou le Parti social-démocrate (PSD) de Bruno Amoussou ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes.

Quant à Houngbédji et Talon, ils n’ont jamais filé le parfait amour. Lors de la présidentielle de 2016, l’avocat avait soutenu Lionel Zinsou et était allé jusqu’à dénoncer « la confusion des genres » que représentait la candidature de l’homme d’affaires Talon, qualifiée de « danger pour la démocratie ». Sans doute est-ce par pragmatisme qu’il avait rejoint la mouvance présidentielle dès le lendemain de l’élection de Patrice Talon. Cela n’aura en tout cas pas suffi à les réconcilier…

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