Parité au travail : les bonnes pratiques d’Access Bank
Le groupe nigérian Access Bank a adopté une stratégie volontariste pour promouvoir l’avancement des femmes en son sein et a développé des produits financiers qui leur sont destinés.
Un Women in Business Meeting placé sous le signe de l’innovation
250 dirigeantes africaines de haut niveau sont attendues à Paris, les 17 et 18 juin prochains, pour débattre de la place des femmes dans les sciences et des effets de la 4e révolution industrielle sur leurs entreprises.
Comment permettre aux femmes africaines de briser le plafond de verre qui les limite dans le monde du travail ? Au Nigeria, Access Bank, qui développe depuis des années une stratégie volontariste en matière d’émancipation des femmes au sein de l’entreprise, pourrait apporter quelques éléments de solution.
La banque, présidée par la Nigériane Mosun Belo-Olusoga, a obtenu en 2018, un résultat après impôts de 95 milliards de nairas (227 millions d’euros) pour un total de bilan de 11,8 milliards d’euros. Elle dispose de 350 agences dans sept pays subsahariens et a remporté il y a peu, à Kigali, la distinction de Gender Leader, attribuée par l’Africa CEO Forum.
Instances de direction
À l’échelle du continent, un bon marqueur des freins qui subsistent est la représentation des femmes dans les instances de direction. Par rapport au reste du monde, le secteur privé africain n’est pas en retrait, mais il colle à la tendance globale : les femmes sont largement sous-représentées dans la hiérarchie du secteur privé. Selon « Women Matter » un rapport du cabinet McKinsey publié en 2016, « les femmes détiennent 14 % des sièges dans les organes de direction, contre 13 % au niveau mondial.
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Plus on s’élève, plus les chiffres sont mauvais : 5 % des directeurs généraux sont des femmes (moyenne mondiale, 4 %). » Pourtant, souligne le cabinet qui a mesuré les performances de 210 entreprises : « Les profits sont en général supérieurs de 20 % dans les groupes où les femmes sont largement représentées. » L’étude ne donne pas d’explication à cette corrélation.
Pour Omobolanle Victor-Laniyan, directrice du département Développement durable chez Access Bank, il y en aurait pourtant une : « Les femmes apportent un bon équilibre. Dans les faits, elles se révèlent plus attentives aux risques, capables aussi de mieux se concentrer… Dans les instances de direction, elles ont de meilleurs résultats », affirme-t-elle.
Arrivée il y a près de onze ans dans le groupe, Omobolanle a forgé son expertise de ces questions en commençant dans le journalisme. Durant trois ans, elle rédige une chronique qui se saisit du sujet dans le quotidien nigérian Punch. Puis elle intègre le groupe agroalimentaire britannique Cadbury, à la tête de la Responsabilité sociale de l’entreprise. L’égalité de genre fait partie de son domaine de compétence.
En 2009, elle est recrutée chez Access Bank pour installer le département du développement durable. « Nous avons établi des principes de durabilité, neuf en tout, et le cinquième est consacré à l’émancipation des femmes. Aujourd’hui, ils ont été adoptés par la Banque centrale du Nigeria. » Cette dernière demande notamment que 30 % des membres des organes de direction soient des femmes.
Vie privée et vie professionnelle
D’après une étude du Nigeria’s Wimbiz (Women in Management, Business and Public Service), citée par la BAD, l’objectif est encore loin d’être atteint à l’échelle du pays. En 2014, date butoir posée par la Banque centrale nigériane, l’association établissait que dans les sociétés du secteur financier, dont les banques, 16 % des sièges dans les instances de direction étaient occupés par des femmes. Au sein d’Access Bank, ce seuil est dépassé puisqu’un tiers de ces sièges sont occupés par des collaboratrices.
L’établissement a mis en place différents dispositifs pour changer la donne. Avec l’Access Women Network, les échanges entre les femmes du groupe, quelle que soit leur position, sont encouragés : mise en réseau, ateliers et tutorat pour aider les femmes en début de carrière à vraiment exprimer leur potentiel. « Mais nous avons aussi besoin d’impliquer les hommes, d’où l’établissement des Male Champions for Women, un groupe d’hommes qui se consacre à ces questions. Nous voulons créer un environnement qui soit favorable à ce que les femmes exercent au plus haut niveau. »
« Dans notre société, une femme dont le couple n’arrive pas à avoir d’enfant va subir énormément de pression, notamment venant de sa belle-famille », explique Omobolanle Victor-Laniyan
Une bonne part des échanges et thèmes abordés concerne l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Dans son rapport, McKinsey soulignait qu’il était aussi important de réfléchir à des horaires aménagés, et à une possibilité de travailler à la maison pour alléger le syndrome de la « double journée de travail », qui touche la plupart des femmes.
« Nous vivons dans une société patriarcale qui reste dominée par les hommes, commente Omobolanle Victor-Laniyan. Pour certains, il n’est pas évident que la place d’une femme soit au travail et non juste à la maison. » Pour cela, Access Bank a aussi pris des mesures : une égalité salariale stricte et des avantages sociaux non négligeables. « Cela permet aussi de convaincre l’entourage familial de leur valeur professionnelle », poursuit la dirigeante nigériane.
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Autre point fort : une politique de congé maternité qui accorde six mois aux femmes et deux semaines aux hommes alors que ce n’est pas une obligation légale au Nigeria. Des packages avantageux pour les traitements de fertilité sont aussi proposés à tous les employés. Access Bank finance également des programmes qui permettent aux hôpitaux d’améliorer leurs standards en la matière. « Dans notre société, une femme dont le couple n’arrive pas à avoir d’enfant va subir énormément de pression, notamment venant de sa belle-famille », explique Omobolanle Victor-Laniyan.
Cette philosophie qui mise sur l’avancement des femmes concerne aussi les services offerts par la banque : depuis juillet 2014, la W initiative, (W comme woman) regroupe des produits ou programmes spécialement destinés aux femmes, tel que le W Power Loan, qui s’adressent aux besoins spécifiques dans trois domaines clés : carrière, entrepreneuriat et vie de famille, avec, par exemple, des prêts, des cursus de formation, une couverture médicale…
« En tant qu’institution financière, nous avons un rôle critique dans la société, basé sur la confiance. Et la confiance doit se gagner », conclut la dirigeante.
Accès au crédit
Récemment lancée, l’initiative W Power Loan appuie les femmes entrepreneuses qui ont des difficultés d’accès au crédit bancaire, une situation d’autant plus compliquée que beaucoup n’ont pas de compte en banque. Depuis juillet 2018, 53 prêts ont été accordés pour un montant de 800 millions de nairas (1,985 million d’euros).
Dans la même période plus de 2 millions de femmes ont pu ouvrir un compte dans une des filiales d’Access Bank. Des sessions pour former à la comptabilité, aux démarches fiscales et légales ont été organisées et ont profité à plus de 94 000 personnes au Nigeria, mais aussi au Ghana, au Rwanda et en Zambie.
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