Smartphones : un start-upper pour redresser le tunisien Cellcom

En difficulté, le fabricant et distributeur tunisien Cellcom a fait appel à l’expert du big data Amine Chouaieb. Un rapprochement atypique entre le monde industriel et celui de l’innovation.

Almine Chouaieb a été élu en 2015 meilleur entrepreneur par le Centre des jeunes dirigeants. © Ons Abid pour JA

Almine Chouaieb a été élu en 2015 meilleur entrepreneur par le Centre des jeunes dirigeants. © Ons Abid pour JA

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Publié le 9 juillet 2019 Lecture : 3 minutes.

Au centre de cyberdéfense de l’opérateur de télécoms Inwi, à Casablanca. © INWI
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Télécoms : les nouveaux enjeux

La pénétration croissante des smartphones sur le continent ouvre de nouvelles perspectives pour les opérateurs, qui voient grimper le poids de la data – notamment de la musique et des vidéos – , mais les rend aussi plus vulnérables aux cyberattaques.

Sommaire

Fondé en 1997, le groupe tunisien Cellcom est passé, en 2006, du rôle de distributeur des smartphones et des tablettes Motorola et LG Mobile à celui de fabricant, avec sa marque Evertek. S’il possède désormais la troisième part de ce marché en Tunisie (14 %), derrière Samsung et Huawei, il a vu le cours de son action dégringoler de plus de 75 % depuis son introduction à la Bourse de Tunis, en 2014, et son chiffre d’affaires, de 10 millions d’euros en 2018, est en baisse de 7 % par rapport à 2017.

Les patrons tunisiens aiment généralement jouer les prolongations ou favoriser les successions familiales. Mais cela n’a pas été le credo de la famille Hamila, qui possède plus de 50 % de Cellcom à travers son holding YKH (pour Yassine Khalifa Hamila). Afin de redresser la barre, elle est allée chercher en avril 2019 un pur produit de l’écosystème des start-up post-révolution, Amine Chouaieb, âgé de seulement 33 ans. Le fondateur de Chifco, pionnier à Tunis de l’internet des objets (IoT), du machine-learning et du big data, a été, entre autres, élu en 2015 meilleur entrepreneur par le Centre des jeunes dirigeants et distingué par Microsoft pour sa capacité à innover.

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Booster la recherche et développement

Le trentenaire tunisien est venu chez Cellcom avec Chifco pour dot. La start-up doit jouer le rôle d’un super-département de recherche et développement. Ses ingénieurs planchent sur la possibilité de greffer des outils connectés aux appareils électroménagers de la firme. Avec sa maîtrise du big data, la jeune pousse doit améliorer la fidélisation des utilisateurs des quelque 3 millions de téléphones Cellcom, en leur proposant notamment des offres exclusives. Une révolution numérique qui doit aussi s’appliquer aux relations avec les distributeurs en exploitant au mieux les bases de données.

Même si la start-up perd en autonomie, ses accès aux ressources financières augmentent, ce qui accélère l’innovation

« Nous sommes en discussion avec des opérateurs majeurs ailleurs sur le continent, mais nous devons d’abord faire nos preuves ici, en Tunisie », précise Amine Chouaieb, qui table sur une progression en 2019 de 18 % du chiffre d’affaires, pour atteindre les 40 millions de dinars (12 millions d’euros).

« Ce deal est une grande étape pour le rapprochement entre le monde industriel et le monde de l’innovation. Même si la start-up perd en autonomie, ses accès aux ressources financières augmentent, ce qui accélère l’innovation. J’espère qu’on verra de plus en plus ce type de collaboration en Tunisie », se réjouit Yehia Houry, directeur de Flat6Labs Tunis, programme d’amorçage et de démarrage de start-up. Chifco doit d’ailleurs quitter ses locaux des Berges du lac pour s’installer chez Cellcom, une fois finalisé le lien juridique entre les deux entités.

Une reprise de 16 % à la Bourse de Tunis depuis son arrivée

Il n’a toutefois pas été évident de passer du style de management informel et décontracté de dirigeant de start-up à celui de patron d’une société d’une centaine d’employés, jonglant avec les créances des clients, les négociations avec les partenaires et l’optimisation logistique.

J’avais en tête un plan de digitalisation rapide de l’entreprise, mais j’ai aussi dû apprendre à composer avec la gestion du quotidien

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« Quand je suis arrivé, j’avais en tête un plan de digitalisation rapide de l’entreprise, avec la volonté de donner accès à nos utilisateurs à des contenus à forte valeur ajoutée. Mais, depuis trois mois, j’ai d’abord appris à composer avec des problèmes de gestion du quotidien que je n’avais pas forcément anticipés », avoue Amine Chouaieb. Qui reconnaît aussi ne toujours pas comprendre les logiques boursières expliquant la sous-valorisation actuelle du titre du groupe, qui a pourtant repris 16 % sur la place financière de Tunis depuis son arrivée aux manettes.

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