Tunisie : Ennahdha au bord de la fitna
Dissensions internes, guerre de succession, congrès en souffrance, érosion de l’électorat… Malgré sa victoire aux législatives, le parti d’obédience islamiste apparaît de plus en plus fragilisé.
«Ce n’est pas aux électeurs de changer, mais au parti. » La formule est de Samir Dilou, chargé de la campagne d’Abdelfattah Mourou, quelques jours après une présidentielle où le candidat d’Ennahdha est arrivé troisième, avec 12,9 % des voix. Un score honorable pour une première tentative historique, mais loin des espoirs soulevés par son (relatif) succès aux municipales de 2018.
« Il ne faut pas oublier que l’érosion de l’électorat n’a pas seulement touché Ennahdha mais aussi tous les partis et les politiciens », nuançait alors Mourou. Pourtant, alors que le déclin d’autres groupes majoritaires a parfois pris des allures de lente agonie – comme pour Nidaa Tounes – , les fissures ne sont apparues que plus récemment au sein du parti d’obédience islamiste, où la discipline a longtemps régné. Habituellement mises en sourdine, les dissensions internes sonnent désormais comme autant de fausses notes.
Simple effet de contraste ou approfondissement des failles ? La course à la présidentielle révèle bien des lignes de fracture. Non seulement le parti a tardé à se mettre en selle et à se choisir un candidat interne, mais il a vu des rivaux issus de ses rangs entrer dans la compétition, comme l’ancien Premier ministre Hamadi Jebali, qui a quitté la formation en 2014, ou Hatem Boulabiar, cadre de la Choura (conseil consultatif du parti) fraîchement démissionnaire. Sans compter la concurrence, en externe, de Seifeddine Makhlouf, surnommé « l’avocat des terroristes », qui a surfé sur la déception d’une frange de l’électorat d’Ennahdha. Et celle du nouveau président, Kaïs Saïed, indépendant certes, mais qui a bénéficié du report de voix des bases du parti.
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