RDC : Martin Fayulu et Moïse Katumbi, opposants aux antipodes

Tous deux membres de la coalition Lamuka, les deux opposants congolais ont cependant une stratégie diamétralement opposée. Tandis que Martin Fayulu continue de réclamer « la vérité de urnes », Moïse Katumbi plaide au contraire pour une opposition « constructive et exigeante », en acceptant notamment que Lamuka prenne le poste de porte-parole de l’opposition.

Martin Fayulu et Moïse Katumbi. © Jeune Afrique

Martin Fayulu et Moïse Katumbi. © Jeune Afrique

Publié le 13 novembre 2019 Lecture : 3 minutes.

La dernière fois que les membres de la coalition Lamuka se sont réunis, c’était le 29 juillet, à Lubumbashi, dans la résidence cossue de Moïse Katumbi. Outre l’ex-gouverneur du Katanga, étaient présents Jean-Pierre Bemba, Martin Fayulu et Adolphe Muzito.

À l’époque déjà, leur entente paraissait battre de l’aile, mais aucune annonce fracassante n’avait suivi la rencontre. Moïse Katumbi, dont le mandat de coordinateur de la coalition de l’opposition s’achevait ce jour-là, avait officiellement passé le relais à Jean-Pierre Bemba, et tous avaient fait mine de surmonter leurs divergences.

la suite après cette publicité

Quatre mois plus tard, on n’en est plus là : Martin Fayulu et Moïse Katumbi n’hésitent plus à afficher publiquement leurs dissensions. Continuant à réclamer « la vérité des urnes », Fayulu, candidat malheureux à l’élection présidentielle de décembre 2018, ne reconnaît toujours pas la victoire de Félix Tshisekedi. Face à lui, Moïse Katumbi, qui l’avait soutenu durant sa campagne, estime qu’il est temps de tourner la page et de s’inscrire dans le jeu institutionnel.

Un porte-parole pour l’opposition ?

Depuis quelques semaines, les deux hommes sont en désaccord au sujet du poste de porte-parole de l’opposition. Une loi de décembre 2007, qui encadre cette fonction, stipule que son détenteur est désigné par les députés nationaux et par les sénateurs, soit par consensus, soit au terme d’une élection au scrutin majoritaire à deux tours. Elle prévoit aussi que l’heureux élu aura rang de ministre et pourra bénéficier des avantages et immunités y afférents.

Sans surprise, Martin Fayulu ne veut pas en entendre parler. « Accepter ce poste signifie accepter que Tshisekedi a gagné les élections », a-t-il expliqué le 26 octobre, depuis Paris, convaincu que ses rivaux au sein de l’opposition cherchent à réduire son influence. « Ils n’y arriveront pas ! » a-t-il averti.

Katumbi, en revanche, se verrait bien endosser le rôle de porte-parole, même s’il se garde bien de le dire clairement. « Je ne suis pas là pour [prétendre à] des postes, mais pour l’avenir de notre pays », confie-t-il, tout en rappelant que cette fonction n’a pas été occupée durant les deux mandats de Joseph Kabila et que, « dans un pays que l’on veut reconstruire, il faut une opposition forte, et donc un porte-parole ».

la suite après cette publicité

Tacles et égratignures

L’ancien gouverneur du Katanga n’apprécie guère d’être régulièrement taclé par Martin Fayulu. Le 26 octobre, il était, lui, en tournée à Goma, dans l’est de la RD Congo et, devant ses partisans, a égratigné son ancien allié. « Si tu dis que tu n’es pas [membre] de l’opposition [Fayulu dit ne pas en faire partie, puisqu’il se considère comme le président élu], il faut retirer tes députés de l’Assemblée nationale ! »

Interrogé par JA alors qu’il poursuivait son « safari » dans le Maniema, le 2 novembre, Katumbi a ainsi résumé la situation : « J’ai mes positions, Martin Fayulu a les siennes. J’estime que la loi doit être respectée. J’étais personnellement opposé à la saisine de la Cour constitutionnelle pour contester le résultat des élections. Les leaders de Lamuka ont insisté, dont acte. Un jugement a été rendu, qui doit maintenant être respecté. Je suis là pour aller de l’avant. »

la suite après cette publicité

Pour ne rien arranger, les membres de Lamuka sont également divisés sur la question de la répartition des postes au sein des commissions et du bureau de l’Assemblée nationale. Ils auraient dû se réunir avant la fin d’octobre, Jean-Pierre Bemba devant à son tour céder sa place de coordinateur à Adolphe Muzito. Mais ils ne sont parvenus à s’entendre ni sur un lieu ni sur une date.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image