Gabon – Mays Mouissi, analyste économique : « Je crois la diversification possible »

L’analyste et consultant librevillois revient sur les handicaps de l’économie gabonaise, sur les résultats mitigés du Plan de relance économique (PRE) 2017-2019 et analyse les conditions de la reprise, sur laquelle il se montre néanmoins optimiste.

Mays Muissi, anayste économique gabonais © DR

Mays Muissi, anayste économique gabonais © DR

ProfilAuteur_AlainFaujas

Publié le 18 décembre 2019 Lecture : 2 minutes.

À Libreville au Gabon. (photo d’illustration). © Jacques Torregano pour JA
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Gabon : enfin la relance ?

Si les récents remaniements au sein du cabinet présidentiel et du gouvernement ont inquiété les uns et déconcerté les autres, ils ont aussi et surtout clarifié la situation au sommet de l’État : un an après son AVC, Ali Bongo Ondimba est bel et bien de retour aux commandes de l’exécutif et dicte le tempo.

Sommaire

Jeune Afrique : Pourquoi la reprise de l’économie gabonaise est-elle si lente ?

Mays Mouissi : Cela tient à sa très grande dépendance vis-à-vis du pétrole. Elle accélère quand le prix du baril monte et freine quand celui-ci baisse, car le pétrole a un effet d’entraînement sur toute l’économie. Le volume des investissements publics a été impacté par la chute des cours en 2014, ce qui a bridé la croissance.

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L’essentiel des emplois gabonais se trouvant dans le secteur public, les recettes pétrolières en berne ont obligé l’État à prendre des mesures d’austérité budgétaire, dont un gel des embauches dans la fonction publique, en contradiction avec les objectifs du gouvernement en matière de création d’emplois.

Vous avez calculé que seuls deux objectifs du Plan de relance de l’économie [PRE] 2017-2019 sur onze ont été atteints. Pourquoi cet échec ?

Le gouvernement s’appuie sur les conclusions plutôt satisfaisantes du FMI, qui prévoit une croissance de 3,4 % cette année, alors que lui tablait sur une croissance de 5 %. Quand il existe une telle différence entre le rythme souhaité et le rythme atteint, il est impossible d’atteindre les autres objectifs du Plan.

L’État commence à payer ses arriérés au secteur privé. Est-ce la fin d’un des obstacles à la reprise ?

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Il existe toujours deux problèmes au sujet des arriérés. Le premier est qu’en commençant à payer ses dettes au secteur privé l’État a décidé de traiter toutes les entreprises de la même façon. Cela ne gêne pas les grandes entreprises et les multinationales, qui savent gérer les impayés et disposent d’une trésorerie leur permettant de tenir. Ce n’est pas le cas des PME, qui sont d’autant plus à la limite de la survie que l’État ne tient pas parole et ne décaisse pas régulièrement.

Le deuxième problème concerne le remboursement de la TVA collectée par les entreprises. Ce remboursement n’a pas lieu en temps et en heure, parce que la TVA versée par les entreprises est mélangée dans la même caisse, avec d’autres recettes de l’État. Il faudrait créer une caisse spécifique pour la TVA où apparaîtraient clairement les montants qui doivent être restitués sans délai aux entreprises.

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Pourquoi la diversification de l’économie tarde-t-elle à relayer le pétrole ?

Je crois cette diversification possible, car ce qui a été entrepris dans le secteur du bois va dans le bon sens. L’interdiction d’exporter des grumes non traitées a permis de développer la zone de Nkok, qui peut accueillir trois ou quatre fois plus d’entreprises [une centaine actuellement].

Nous avons encore des marges pour réussir une troisième transformation du bois. Mais la diversification, ce n’est pas seulement une affaire d’industrialisation. Il faut aussi diversifier les revenus et ceux provenant du bois ne sont pas capables, pour le moment, de compenser les revenus pétroliers.

Il existe des perspectives favorables dans le domaine de la pêche et de l’agriculture. Au moment de l’indépendance, le Gabon était un pays agricole. Le pétrole a tout bouleversé, car on a valorisé l’emploi salarié au détriment de l’emploi agricole et on a même dénigré celui-ci. Aujourd’hui, des salariés du pétrole qui gagnaient 3 000 euros par mois se retrouvent sans ressources. Contraints et forcés, ils doivent se remettre à l’agriculture.

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