Transport aérien : Mauritania Airlines veut s’imposer sur le marché régional

Préparant son arrivée à Paris en 2020, la compagnie, sous l’impulsion de sa directrice générale, mène une politique offensive pour conquérir des parts de marché jusqu’en Afrique centrale.

Un Boeing 737 de la Mauritania Airlines, ici à l’aéroport de Casablanca au Maroc © ERIC SALARD

Un Boeing 737 de la Mauritania Airlines, ici à l’aéroport de Casablanca au Maroc © ERIC SALARD

Rémy Darras © Francois Grivelet pour JA

Publié le 19 décembre 2019 Lecture : 3 minutes.

Directrice générale de Mauri­tania Airlines depuis avril, Amel Mint Maouloud se serait bien vue couper le ruban de la ligne Nouakchott-Paris en juillet. Tout était prêt pour que se déploient sur cette liaison les ailes du Boeing 737 Max, dont la compagnie publique fut le premier opérateur sur le continent… Las, la catastrophe qui, en mars, a frappé Ethiopian Airlines a immobilisé au sol tous les Max et retardé ses plans.

Malgré cela, le trafic de la compagnie s’est maintenu (300 000 passagers en 2018, 65 % de taux de remplissage) au premier semestre et a même progressé de 8 % depuis juillet.

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L’arrivée en avril de deux Embraer neufs – portant sa flotte possédée en propre à six appareils (trois Boeing, trois Embraer) – lui a permis de faire face. « Aujourd’hui, nous pourrions desservir Paris avec notre 737‑800. Mais nous avons préféré rester prudents et disposer d’un back-up, d’autant que notre réseau d’approvisionnement en carburant et en pièces de rechange est lent et difficile, et que nous souffrons d’un manque cruel de techniciens », indique l’énergique dirigeante de 36 ans, croisée dans les travées de la 51e assemblée générale de l’Afraa (African Airlines Association), le 11 novembre, à Maurice.

L’ouverture de la ligne est prévue pour le premier trimestre de 2020, « dès que nous aurons reçu des autorités américaines l’autorisation de vol pour le Max ».

Depuis 2019, Bamako se retrouve orpheline en capacités, après le départ des français Aigle Azur et Corsair

Mais à travers cette desserte, l’aérodynamicienne de formation, qui fut chef de projet de la première centrale éolienne de Nouakchott et, jusqu’en mars, ministre des Transports, a un autre plan en tête : couvrir avec le même avion le marché malien, la demande est forte.

Depuis 2019, Bamako se retrouve orpheline en capacités, après le départ des français Aigle Azur et Corsair. Se positionner en cabotage sur des lignes à potentiel, peu ou pas desservies par ses concurrents régionaux Air Côte d’Ivoire, Asky, Rwandair, Air Sénégal ou Air Burkina, telle semble être la recette déjà éprouvée par le troisième pavillon mauritanien, né en 2012 des cendres de Mauritania Airways, créé avec Tunisair.

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Ajuster la flotte et les fréquences en fonction de la demande du marché

Cet opérateur de taille encore modeste (60 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018), dont le fioul représente 40 % des charges, a scindé ses opérations en deux réseaux. Le réseau septentrional, qui, outre Tunis, le vol quotidien vers Casablanca (en partenariat avec la Royal Air Maroc) et la ligne saisonnière de Las Palmas (Canaries), dessert la capitale économique, Nouadhibou, et la capitale minière, Zouerate. Deux destinations prometteuses au vu des récentes découvertes d’hydrocarbures et des permis d’exploitation délivrés.

S’adapter à un voyageur africain, qui, contrairement à l’Européen, se décide souvent à la dernière minute

Mais c’est le réseau méridional de la compagnie – déployé avec six couloirs différents vers huit capitales d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale –, représentant 53 % de son trafic, qui constitue son relais de croissance. Sa base de trafic étant trop faible depuis Nouakchott, c’est donc loin de la capitale qu’elle va puiser le vivier de sa clientèle, avec ses vols de Cotonou vers Brazzaville, Libreville et Pointe-Noire (depuis Bamako) ou d’Abidjan vers Conakry et Freetown (depuis Dakar).

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Des capitales qu’elle dessert pour optimiser les coûts, en ajustant au dernier moment sa flotte et ses fréquences en fonction de la demande du marché et de la concurrence. « Pour s’adapter à un voyageur africain, qui, contrairement à l’Européen, se décide souvent à la dernière minute », précise la DG.

Pas de quoi effrayer cependant les autres acteurs régionaux, bien que « Mauritania Airlines ait tendance à diviser les prix par deux. Sur des vols de trois heures, sa tarification équivaut parfois à un vol de une heure et demie », estime un concurrent, qui s’interroge sur les éventuelles pertes engendrées. Si c’est à ce prix que se conquièrent des parts de marché…

L’intercontinental à l’étude

À condition de disposer d’une flotte suffisante, Mauritania Airlines ne renonce pas au projet de relancer un jour la ligne rentable du hadj vers Djeddah, via N’Djamena ou Niamey, jadis exploitée par Air Afrique, voire à ouvrir une ligne outre-­Atlantique, après l’abandon, en août, par South African Airways de sa liaison Dakar-Washington.

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