Boissons : l’algérien NCA Rouiba assure son avenir avec le français Castel
En grande difficulté financière, le leader algérien des boissons fruitées NCA Rouiba a officialisé la prise de contrôle du groupe français Castel, qui signe un retour en force sur le marché des jus.
C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour NCA Rouiba, marque emblématique de jus de fruits en Algérie. À l’issue d’une assemblée générale extraordinaire, le 15 janvier, le groupe dirigé par Slim Othmani, l’un des fils du fondateur, a officialisé son passage sous le contrôle du géant français de la bière en Afrique : Castel.
Une augmentation de capital, largement réservée à Brasseries internationales Holding (BIH), va permettre à la filiale de Castel de devenir l’actionnaire majoritaire de NCA Rouiba. Ce mouvement doit sauver le fleuron algérien, qui fait face à un choc de trésorerie sans précédent en raison de difficultés de gestion internes combinées à un marché en surchauffe et à la faiblesse de la croissance du pays.
La prise de pouvoir de Castel constitue une rupture dans l’histoire du groupe familial, fondé en 1966 par Salah Othmani (et par son père, Mohamed Saïd). Les membres de la famille, jusqu’ici actionnaires majoritaires, vont basculer dans le camp minoritaire. L’accord avec Castel a été conclu avec certains héritiers, représentant 44,04 % du capital du groupe, BIH prévoyant également de racheter les 14,82 % de participation du fonds panafricain Africinvest, entré en 2005.
Effondrement des fonds propres
Il y a une dizaine d’années, le groupe algérien avait aussi été contraint à céder sa filiale Fruital, embouteilleur de Coca-Cola, à l’espagnol Cobega. Si Slim Othmani demeure président du conseil d’administration de NCA Rouiba, c’est un homme de Castel, Lotfi Kadaoui, passé par Lesieur Cristal et Imperial Tobacco au Maroc, qui devient directeur général. BIH sera aussi représenté par deux administrateurs à la tête du groupe.
« C’est difficile pour la famille, mais elle n’avait pas vraiment le choix », commente un connaisseur du secteur. Au 30 novembre 2019, NCA Rouiba a présenté un CA de 27,3 millions d’euros et une perte de 6,4 millions sur onze mois, contre 60 millions de CA et près de 1 million d’euros de bénéfices en 2016. Sa dette, qui représentait déjà quatre fois ses capitaux propres en 2018, a bondi à 19 fois ce niveau l’an dernier, après un effondrement des fonds propres de l’entreprise. Le futur actionnaire majoritaire du groupe, BIH, a déjà appuyé l’octroi d’un crédit bancaire de 7,1 millions d’euros et a promis un apport de fonds propres via l’augmentation de capital.
Un marché de 7 millions d’hectolitres par an
La situation de NCA Rouiba était critique. Début novembre, dans une lettre ouverte, Slim Othmani avait regretté le recours excessif à l’endettement et le volume important de créances en souffrance auprès des distributeurs, tout en dénonçant la concurrence déloyale du secteur informel, la saturation du marché des jus et la mauvaise conjoncture du pays. Si ces derniers maux sont aussi dénoncés par l’Association des producteurs algériens de boissons (Apab), l’exposition au grand public, par lettre ouverte, des difficultés de l’entreprise n’a pas fait l’unanimité au sein des héritiers du groupe familial, selon nos informations.
Quoi qu’il en soit, NCA Rouiba constitue une belle prise pour Castel. Même concurrencée par Bifa, Ramy et N’Gaous, la marque Rouiba reste forte sur un marché substantiel de 7 millions d’hectolitres par an. En outre, elle doit permettre à BIH, spécialiste de la bière et des boissons gazeuses, de se relancer sur le segment des jus après une tentative ratée en 2012 avec Judor. Le français devra toutefois composer avec les difficultés du marché algérien, dont l’épineuse question de la distribution et des concurrents, en particulier Bifa, très compétitifs. Sur ce point, il pourrait bénéficier d’un peu de répit alors que l’un des grands du secteur, N’Gaous, est bousculé par la condamnation à de la prison pour corruption de son patron, Ahmed Mazouz.
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