Guinée : les dessous du bras de fer entre Alpha Condé et l’opposition

Le 1er mars, les électeurs seront appelés à élire leurs nouveaux députés et, surtout, à valider la réforme constitutionnelle que leur soumet Alpha Condé. À moins qu’ils ne préfèrent suivre les consignes de boycott de l’opposition. Décryptage.

Le président guinéen, à Kankan, le 22 novembre 2019. © Présidence

Le président guinéen, à Kankan, le 22 novembre 2019. © Présidence

FRANCOIS-SOUDAN_2024

Publié le 17 février 2020 Lecture : 11 minutes.

Le compte à rebours vers l’une des consultations populaires les plus électriques de l’année en Afrique est désormais lancé. Le 1er mars, dans deux semaines, les électeurs guinéens seront appelés aux urnes pour un double scrutin, l’un ordinaire – les législatives – et l’autre extra­ordinaire – un référendum constitutionnel.

Si renouveler les membres d’une Assemblée nationale obsolète depuis des mois relève (presque) de la salubrité publique, approuver (ou rejeter) une nouvelle Loi fondamentale via un exercice de démocratie directe est beaucoup moins fréquent. Et beaucoup plus susceptible de faire naître des polémiques quand on soupçonne l’initiateur de ce référendum « par le haut » (comme disait Charles de Gaulle) d’intentions personnelles à peine dissimulées.

En temps normal, il suffirait à l’opposition de faire campagne pour le « non » et de l’emporter dans les urnes pour que ce dernier renonce. Débattre, voter : c’est à cela qu’Alpha Condé a tenté en vain d’inviter ses adversaires. Mais la défiance vis-à-vis d’un processus électoral qu’elle qualifie de « vicié » (à moins que ce ne soit le peu de confiance envers ses propres capacités à l’emporter dans les urnes) est telle que cette même opposition a décidé d’user de tous les moyens pour qu’aucun des deux scrutins du 1er mars n’ait lieu, ou qu’à tout le moins le taux de participation soit si faible qu’ils en perdent toute signification. Décryptage d’une épreuve de force à hauts risques.

• Quel enjeu pour les législatives ?

En état de prorogation exceptionnelle depuis un an, l’Assemblée nationale guinéenne se devait d’être renouvelée, ce que nul ne conteste. Les candidats présentés par une trentaine de partis politiques sont en lice pour les 114 sièges de députés dans le cadre d’un scrutin mixte (majoritaire pour le tiers d’entre eux, à la proportionnelle pour les autres), organisé par une Commission électorale nationale indépendante (Ceni) qui, jusqu’au retrait de l’opposition radicale fin 2019, était composée sur une base paritaire.

Outre la mouvance présidentielle du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG)–Arc-en-ciel, participeront à l’élection du 1er mars des petits partis agrégés autour de personnalités issues pour la plupart des grandes formations et relevant de l’opposition modérée. Par rapport aux précédentes législatives de 2013, toute une série d’initiatives ont été prises pour améliorer la fiabilité du processus électoral (mise à jour du fichier, kits d’enrôlement biométriques, logiciel de lecture faciale permettant d’éliminer les mineurs frauduleusement inscrits, etc.), sous la houlette d’un opérateur technique slovaque recruté sur appel d’offres, Innovatrics.

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