Selim Kharrat : « Ennahdha tente de garantir son existence »

Politologue, président de l’ONG Al Bawsala, Selim Kharrat décrypte pour Jeune Afrique le nouvel équilibre des pouvoirs qui s’est installé en Tunisie.

Selim Kharrat, directeur exécutif de Al Bawsala. © Nicolas Fauqué/www.imagesdetunisie.com

Selim Kharrat, directeur exécutif de Al Bawsala. © Nicolas Fauqué/www.imagesdetunisie.com

Publié le 24 février 2020 Lecture : 1 minute.

Jeune Afrique : Ennahdha est-elle à l’origine de la crise ?

Selim Kharrat : Le dénominateur commun, depuis la première tentative de formation d’un gouvernement par Habib Jemli jusqu’à la proposition d’Elyes Fakhfakh, est la méfiance entre les différents partis.

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Par ailleurs, Ennahdha est dans une sorte de déni ; bien qu’elle ait perdu la main avec l’échec de Habib Jemli et ne dispose que de 52 sièges – 70 au maximum avec ses alliés –, elle a continué à avoir une attitude hégémonique dans les négociations. Cela a contribué à braquer les uns contre les autres et à empêcher de trouver un terrain d’entente.

Pourquoi cette sortie de route ?

La méthodologie est complètement erronée. Le référentiel des négociations portait moins sur un projet collectif sur lequel les différents partis se seraient entendus que sur les garanties que chaque formation réclamait.

Ennahdha, qui a pesé pour obtenir un régime semi-parlementaire, craint toujours de disparaître avec la montée de forces éradicatrices comme le Parti destourien libre (PDL) ou l’extrême gauche. Elle tente de garantir son existence, d’autant que les autres formations ont utilisé les négociations pour la mettre en minorité en révélant son agenda caché. Tout cela sur fond de dissensions internes au sein du parti.

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Qu’en est-il d’Elyes Fakhfakh ?

Son erreur n’était pas dans la composition de son gouvernement mais dans son approche initiale. Il s’est revendiqué de la légitimité présidentielle puisqu’il a été désigné par le chef de l’État, mais il a oublié que la confiance lui serait octroyée par le Parlement. Cette erreur d’approche l’a piégé.

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En étant plus stratège, en élargissant les négociations et en posant un référentiel qui lui aurait permis de filtrer ensuite, il se serait garanti un maximum de chances. Il a suivi finalement une consigne, implicite ou non, donnée par le président d’exclure Qalb Tounes des discussions et fourni à ses adversaires, notamment Ennahdha, un argument de taille pour enrayer le processus.

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